On ne peut donner ici
un résumé, encore
moins une analyse d'un traité aussi volumineux et dense. On
espère en capter l'esprit à travers trois moments
représentatifs: l'introduction, véritable
"discours-programme", et sa mise en pratique dans deux
théorèmes célèbres, l'un de
Pascal, l'autre de Poncelet lui-même -probablement son plus
fameux.
L'introduction
Parcourir son
introduction -déjà fort longue!-
révèle les deux
idées fondamentales et novatrices de l'auteur:
tendre à effacer
la multitude de "cas" de la
Géométrie traditionnelle par une approche
plus unificatrice,
et utiliser un principe
de continuité dans la
déformation
des figures, vision topologique avant l'heure... Elle rend aussi, comme
on va le
voir, un hommage vibrant à ses maîtres -Monge
surtout- et
à ceux qu'ils considère comme ses
prédécesseurs: Desargues, en tout premier lieu,
mais aussi Pascal. Extraits choisis (en
italiques;
les mises
en gras
sont de l'auteur de cette page)
L'hommage
au Maître, avant toutes choses...
A
l'époque où MONGE
commença à professer la
Géométrie descriptive ou plutôt cette
Géométrie générale
qui fait le caractère principal des ouvrages de cet illustre
Professeur et de ceux
qui ont suivi ses traces dans la même
carrière, MONGE ,
disons-nous, avait raison de recommander aux
Élèves l'étude de la
Géométrie analytique,
celle-ci étant très propre à donner
aux
conceptions géométriques cette extension et cette
généralité qui sont essentiellement
dans sa
nature. [.../...]
Les ouvrages
mêmes de MONGE,
ceux de ses Élèves, parmi lesquels nous devons
surtout
citer l'auteur des Développements
de Géométrie,
ont prouvé que la Géométrie
descriptive, la
langue de l'artiste et de l'homme de génie, peut se suffire
à elle-même, et atteindre à toute la
hauteur des
conceptions de l'Analyse algébrique.
Cependant il reste encore quelque chose à faire; toutes les
lacunes, tous les vides ne sont pas encore remplis, et ces lacunes, ces
vides se font surtout sentir dans ce qui semble tenir de plus
près aux connaissances préliminaires de la
Géométrie. Les grandes questions sont
résolues, la
doctrine est faite, mais elle repose sur certaines données
particulières... [.../...]
A la
recherche d'un principe de
généralité...
C'est donc cette
Géométrie
particulière qu'il faut chercher actuellement à
perfectionner, à généraliser,
à rendre
enfin indépendante de l'Analyse algébrique; c'est
l'étude des propriétés des lignes et
des surface
individuelles qu'il faut chercher à ramener dans le domaine
de la simple Géométrie, á laquelle
elle semble
encore se soustraire dans certains genres de
questions. [.../...]
En
effet, tandis que la
Géométrie analytique offre, par la marche qui lui
est
propre, des moyens généraux et uniformes pour
procéder
à la solution des questions qui se présentent,
à
la recherche des propriétés des figures; tandis
qu'elle
arrive à des résultats dont la
généralité
est pour ainsi dire sans bornes, l'autre procède au hasard;
sa
marche dépend tout à fait de la
sagacité de
celui qui l'emploie, et ses résultats sont, presque
toujours,
bornés à l'état particulier de
la figure que
l'on considère. [.../...] Par les efforts
successifs des géomètres, les
vérités
particulières se sont multipliées sans cesse,
mais il
est arrivé rarement que la méthode et la
théorie
générale y aient
gagné [.../...]
Ce reproche ne saurait s'adresser à
la Géométrie dans l'espace, à cette
Géométrie
générale créée par le
génie de MONGE; sa marche est exempte d'
hésitations, elle procède
avec ordre, les lignes et les surfaces qu'elle contemple sont
indéfinies, rien ne limite la pensée, et ses
résultats
ont, jusqu'à un certain point, toute l'extension de ceux de
l'Analyse algébrique, extension qui souvent
étonne et
embarrasse celui qui l'emploie. [.../...]
On
a failli avoir peur un instant, mais... Ouf! Voilà Monge,
son
vénéré maitre, blanchi de toute
suspicion. Il est
amusant tout de même de constater que l'argument reviendra,
tout
aussi fort et définitif, quelques pages plus loin; "Encore une fois,..."
s'excusera-t-il avant de remarteler à l'usage du lecteur
distrait; on ne sait jamais!
Dans
la Géométrie ordinaire, qu'on nomme souvent la
synthèse, les principes sont tout autres, la marche est plus
timide ou plus sévère; la figure est
décrite,
jamais on ne la perd de vue, toujours on raisonne sur des grandeurs,
des formes réelles et existantes, et jamais on ne tire de
conséquences qui ne puissent se peindre, à
l'imagination ou à la vue, par des objets sensibles; on
s'arrête dès que ces objets cessent d'avoir une
existence positive et absolue, une existence physique. La rigueur est
même poussée jusqu'au point de ne pas admettre les
conséquences d'un raisonnement, établi dans une
certaine disposition générale des objets d'une
figure,
pour une autre disposition également
générale de
ces objets, et qui aurait toute l'analogie possible avec la
premiére;
en un mot, dans cette Géométrie restreinte, on est
forcé de reprendre toute la série des
raisonnements
primitifs, dès l'instant où une ligne, un point
ont
passé de la droite à la gauche d'un autre, etc.
Or
voilà précisément ce qui en fait la
faiblesse;
voilà ce qui la met si fort au-dessous de la
Géométrie
nouvelle , surtout de la Géométrie analytique.
Le
principe de continuité...
Considérons
une figure quelconque, dans une position générale
et en
quelque sorte indéterminée, parmi toutes celles
qu'elle
peut prendre sans violer les lois, les conditions, la laison qui
subsistent entre les diverses parties du système; supposons
que d'après ces données, on ait trouvé
une ou
plusieurs relations ou propriétés, soit
métriques,
soit descriptives, appartenant à la figure [.../...]
N'est-il
pas évident que si, en conservant ces mêmes
données,
on vient
à
faire varier la figure primitive par degrés
insensibles, ou qu'on
imprime à à
certaines parties de
cette figure un mouvement continu d'ailleurs quelconque, n'est-il pas
évident que les propriétés et les
relations,
trouvées pour le premier système, demeureront
applicables aux états successifs de ce système,
pourvu
toutefois qu'on ait égard aux modifications
particulières
qui auront pu y survenir, comme lorsque certaines grandeurs se seront
évanouies, auront changé de sens ou de signe,
etc.,
modifications qu'il sera toujours aisé de
reconnaître a
priori, et par des règles sûres?
C'est
du moins ce que l'on conclurait sans peine du raisonnement implicite,
et c'est ce qui, de nos jours, est assez
généralement
admis comme une sorte d'axiome dont l'évidence est
manifeste,
incontestable, et n'a pas besoin d'être
démontrée
: témoin le principe de la corrélation
des figures,
admis par M. CARNOT, dans sa Géométrie
dePosition, pour établir la
régle des signes; témoin encore
le principe des fonctions, employé par nos
plus grands
géomètres pour établir les bases de la
Géométrie
et de la Mécanique; témoin enfin le Calcul
infinitésimal,
la Théorie des Limites, la Théorie
générale des équations, et tous les écrits
de nos jours, oú l'on s'attache à une certaine
généralité dans les conceptions. Or
ce principe, regardé comme un axiome par les plus savants
géométres, est ce qu'on peut nommer le principe
ou la
loi de continuité des relations Mathématiques de
la
grandeur abstraite et figurée.
Monge
et Carnot, figures tutellaires
(École Polytechnique)
La
solution: la vision Projective
En
réfléchissant
attentivement à ce qui fait le principal avantage de la
Géométrie descriptive et de la Méthode
des
coordonnées, á ce qui fait que ces branches des
Mathématiques ofirerit le caractére d'une
véritable doctrine, dont les principes, peu nombreux, sont
liés et enchaînés d'une
manière
nécessaire et par une marche uniforme, on ne tarde pas à
reconnaître que cela tient uniquement à l'usage
qu'elles font de la projection. [.../...] Voici
donc quel est l'avantage de ces différentes
méthodes: par
la projection des figures planes sur des droites, on réduit
l'examen des relations de ces figures à celui de ces relations beaucoup plus
simples entre les distances comprises sur les axes de projections;
au lieu de deux dimensions, on n'en a souvent plus qu'une à
considérer, ou, si l'on en a deux, elles sont toujours
mesurées dans des directions parallèles ou sur
les
mêmes droites.
Poncelet
fait alors le lien
avec la Géométrie Descriptive:
En un mot, toutes les
relations ou propriétés descriptives du plan sont
traduites, par elles, en relations ou
propriétés descriptives de l'espace, et
réciproquement. De là [.../...] doit résulter une
foule de rapprochements et de conséquences infiniment
profitables à la simple Géométrie
et la Géométrie
à trois dimensions, ce dont MONGE a montré les plus
beaux exemples dans sa Géométrie
Descriptive.
[.../...] Il
est évident que ces avantages sont uniquement dus
à la
nature même de la projection qui, en modifiant la forme et
l'espèce particulière des figures, les place dans
des
circonstances ou plus générales ou au contraire
plus
restreintes, sans pour cela en détruire les relations et
propriétés génériques,
ou en les
modifiant seulement d'après des lois fort simples et
toujours
faciles à deviner et à saisir.
Enfin, jusqu'ici nous avons supposé les
coordonnées, ou
projetantes, parallèles entre elles;mais cette condition
n'est
pas indispensable, ou plutôt on peut la remplacer par la condition, que toutes ces projetantes
aillent concourir vers un point ou centre de projection unique du plan
de la figure ou de
l'espace: alors la projection sera proprement ce qu'on nomme conique ou
centrale; ce sera, si l'on veut encore, une sorte de perspective dont
le point de vue sera ce que nous venons de nommer le centre de
projection [.../...].
Vient le temps de conclure
cette première partie de l'Introduction, avant de passer
à son volet historique:
Agrandir
les ressources de la simple Géométrie, en
généraliser les conceptions et le langage
ordinairement
assez restreints, les rapprocher de ceux de la Géométrie
analytique, et surtout offrir
des moyens généraux propres à
démontre et
à faire découvrir, d'une manière
facile, cette
classe de propriétés dont jouissent les figures
quand on
les considère d'une manière purement abstraite
et
indépendamment d'aucune grandeur absolue et
déterminée, tel est l'objet qu'on s'est
spécialement proposé dans cet Ouvrage. De
telles propriétés subsistent, avons nous dit,
à la
fois pour une figure donnée et pour toutes ses projections
ou
perspectives; on a donc dû les distinguer de toutes les
autres
par le nom générique de propriétés
projectives,
qui en rappelle, de manière abrégée,
la véritable nature.
En
souvenir des illustres qui montrèrent la voie...
DESARGUES,
ami de l'illustre DESCARTES,
et dont celui-ci faisait le plus grand cas comme
géomètre; DESARGUES,
qu'on peut appeler, à plus d'un titre, le MONGE
de son siécle, que les biographes n'ont point assez connu,
ni
assez compris; DESARGUES , enfin, que des contemporains,
indignes du
beau titre de géomètre, ont noirci,
persécuté
et dégoûté, pour n'avoir pu se mettre
á la
hauteur de ses idées et de son génie, fut, je
crois, le
premier, d'entre les modernes qui envisagea la
Géométrie
sous le point de vue général que je viens de
faire
connaitre.[.../...]. On peut en voir
un exemple
dans une petite note placée à la fin de certains
exemplaires du Traité de Perspective publié, en
1648,
par BOSSE, qui n'était rien moins
que géomètre,
bien qu'il füt excellent graveur, et qu'il eût
reçu
des leçons de DESARGUES.
DESCARTES
écrivait, en janvier 1639, au sujet d'un, papier de DESARGUES,
que lui avait transmis le P. MERSENNE:
«La façon
dont il commence son raisonnement, en l'appliquant tout ensemble aux
lignes droites et aux courbes, est d'autant plus belle qu'elle est
plus-générale, et semble être, prise de
ce que
j'ai coutume de nommer la Métaphysique de la
Géométrie;
qui est une science dont je n'ai point remarqué qu'aucun
autre
se soit jamais servi, sinon ARCHIMÈDE.
Pour moi, je m'en sers toujours pour juger , en
général
des choses qui sont trouvables, et en quels lieux je les dois
trouver.» [.../...] Il parait bien
évident, d'aprés
cette lettre, que DESARGUES avait
deviné et connu l'extension
qu'on pouvait donner aux principes élémentaires
de la
Théorie des transversales, en les appliquant indistinctement
aux systémes de lignes droites et aux lignes courbes [.../...]
Quant au Traité des
Sections coniques,
dont parle DESCARTES, il parait
être le même que l'écrit qui a
été publié en 1639, sous le titre de Brouillon Projet d'une
atteinte aux événements des rencontres du
cône avec un plan, etc.,
ouvrage que nous ne connaissons que par la critique, fort
amère
et fort peu lumineuse, qui en a été faite par BEAUGRAND,
dans une lettre imprimée qu'on trouve encore à la
Bibliothèque du Roi, et qui est loin, sans doute, de pouvoir
fixer nos idées sur l'esprit de la méthode
employée par DESARGUES. Nous ferons connaître,
au commencement de la IIe Section de cet Ouvrage, le peu
que nous a transmis BEAUGRAND sur cet écrit de DESARGUES , et l'on verra qu'il devait
briller partout des traits de l'originalité et du
génie. [.../...]
PASCAL,
qui n'avait encore que seize ans, et
qui
déjà comptait parmi les plus grands
géométres de son temps, guidé
d'ailleurs par les
préceptes et l'exemple de DESARGUES,
comme il a
soin de nous l'apprendre lui-même, fit paraître, en
1640,
c'est-à-dire peu de temps aprés
l'écrit de ce
dernier, son Essai
sur les Coniques:
c'est une notice
très courte, remarquable par l'usage que PASCAL y fait des
considérations de la perspective ou projection centrale,
et par un passage où, en donnant les plus grands
éloges à DESARGUES,
il dit que ce géométre, dans la
méthode qu'il
avait suivie, traitait généralement des sections
du
cône, sans se servir du triangle par l'axe
.
Parmi plusieurs propositions dans le genre de celles de la
Géométrie de la régle et de la
Théorie des
transversales, cet Essai renferme l'énoncé de la
propriété de l'hexagone inscrit aux coniques,
attribuée á DESARGUES
par DESCARTES, et que PASCAL
a ensuite employée sous le nom d' hexagrammum
mysticum,
dans
un Traité inédit sur les sections coniques, que LEIBNITZ
a eu entre les mains, lors ale son séjour en France, en
1676, et
dont ce grand homme nous a transmis une analyse
très succincte,
qui est tout ce qui reste de cet ouvrage dePASCAL.
A en juger par les titres des six livres dont il était
composé, cet
ouvrage, beaucoup plus étendu que celui de DESARGUES sur le même sujet,
devait renfermer les plus belles des propriétés
projectives des sections coniques,
aujourd'hui généralement connues des
géomètres; et, en effet, elles ne sont, pour la
plupart,
que des corollaires fort simples de l'hexagramme mystique, qui
lui-même n'est qu'une extension eu Porisme de PAPPUS,
ou plutôt d'EUCLIDE,
sur l'hexagone inscrit à l'angle formé par deux
droites.
Quelle fatalité a donc fait. disparaitre ces productions de
trois hommes doués d'un génie
également original
et profond?
[.../...]
La figure de l'Hexagramme Mystique de Pascal, dans le
Traité
de Poncelet
Voir la
Planche
Complète contenant cette figure.
Arrive enfin la
conclusion de toute l'Introduction:
D'ailleurs, le
but de l'ouvrage que nous mettons au jour est d'offrir un tableau,
sinon complet, du moins assez étendu, des
Propriétés projectives; et nous saisirons toutes
les
occasions qui pourront s'offrir de signaler les premiers inventeurs. Cet
ouvrage sera donc un véritable exposé historique
et
scientifique de cette branche intéressante de la
Géométrie. Nous regrettons toutefois
que le
défaut d'espace ne nous permette pas d'y faire entrer nos
recherches relatives aux propriétés projectives
des
courbes géométriques des divers ordres, et nous
oblige
à en renvoyer la publication à une
époque plus
reculée: cet ensemble, plus complet, aurait
montré qu'il
est peu de propriétés
générales de l'étendue
qu'on ne puisse ramener dans le domaine de la simple Géométrie,
au moyen des ressources
offertes, soit par la doctrine des projections, soit par la loi de
continuité.
La
méthode en action: les théorèmes de PASCAL,
BRIANCHON, PAPPUS
Le
théorème de l'hexagramme
mystique de
Pascal -dont la démonstration originale ne nous est pas
connue-
offre à Poncelet un terrain idéal pour
appliquer ses
principes: établir le résultat dans un cas
extrêmement simple, et déduire le cas
général par projection. Il l'énonce
ainsi:
Dans
tout hexagone inscrit à une conique, les points de concours
des
côtés respectivement opposés sont tous
trois
situés sur une même droite.
Hexagramme Mystique de Pascal et Théorème de
Pappus, dans le
Traité
de Poncelet
Voir la
Planche
Complète contenant la figure 24 (Pappus).
Voici donc, in extenso, sa
preuve (n°201 du Traité),
toute sa simplicité réside dans l'usage de la
droite de
l'infini, ensemble de toutes les directions du plan:
deux
droites
qui s'y rencontrent sont parallèles.
Soit
ABCDEF un
hexagone quelconque inscrit à une telle courbe; prolongeons,
deux à deux, les côtés
opposés AB et DE, BC
et EF, CD et AF jusqu'à leur rencontres respectives en L, K,
I; concevons
qu'on mette (109) la figure en projection sur un nouveau plan, de
façon que la droite qui renferme les deux premiers points L
, K,
passe à l'infini, et que la section conique devienne en
même temps un cercle;
[
Le n°109 est l'endroit où il a
établi qu'un tel choix est réalisable ]
les
côtés opposés AB et DE, de concourants
qu'ils
étaient, deviendront parallèles, et il en sera de
même des côtés BC et EF. Or cela ne peut
avoir lieu
pour un hexagone quelconque (convexe ou non convexe) inscrit au cercle,
à moins que les deux derniers côtés CD
et AF, qui
sont opposés, ne soient également
parallèles; car
l'angle en B étant égal à l'angle en
E, puisqu'ils
ont, par hypothèse, les côtés
parallèles,
l'arc ABC sera nécessairement égal à
l'arc
DEF.
[
Le
parallèlisme de CD et AF se prouve alors
par quelques
manipulations élémentaires d'angles, qu'il ne
mentionne
pas. ]
Donc les
points de concours I, K, L de la première figure
sont tous trois rangés sur une même droite.
N.B:
Cette démonstration est peu présentée,
aujourd'hui! On lui préfère une preuve issue du
Théorème de Ménélaüs
(voir ce lien) ou un argument de
Géométrie
Algébrique: deux cubiques se coupent en 9 points
(théorème de Bézout)
Le
Théorème de Pappus
n'est alors plus qu'un cas
particulier
qu'on peut "récupérer", par exemple,
grâce au
principe de
continuité: c'est le cas limite d'une hyperbole
dégénérée en ses deux
asymptotes:
Cette
propriété, qui subsiste quelle que soit
la position
relative des six sommets A, B, C, D, E, F de l'hexagone sur la courbe,
et qui s'applique comme cas particulier au système de deux
lignes droites quelconques AE, BD, tracées dans un
même
plan, est une des plus fécondes qui existent sur les
sections
coniques...
Le
principe de
continuité œuvre encore pour tirer du
théorème une construction de tangente:
Lorsque
cinq points A, B, C, D, E d'une section conique sont donnés
sur
un plan, les fig. 33 et 34 indiquent un moyen fort simple d'en trouver
à volonté un sixième F, et
successivement autant
d'autres qu'on voudra, en ne faisant usage que de la règle
[...]
Supposons que dans
l'hexagone ABCDEF (fig. 33 et
34) , inscrit à une section
conique, l'un
des côtés devienne infiniment petit, ou que sa
direction
soit tangente à la courbe, la
propriété de
l'hexagone subsistera toujours: étant
donnés cinq points A, B, C, D,
E (fig.
35) d'une
section conique, on peut, en l'un deux E, mener une tangente KF
à la courbe, en ne
faisant usage que de la règle.
Voir la Planche
Complète pour les figures!
Le Théorème
de Brianchon quant à
lui illustre une
troisième idée force de Poncelet , la dualité
-ou symétrie- entre les points et les droites.
Revenons
à l'hexagone inscrit ABCDEF (fig. 33),
et supposons qu'on circonscrive à la courbe le
nouvel hexagone abcdef dont les
points de contact sont les sommets du premier; d'après la
construction, les sommets opposés a et d
de l'hexagone circonscrit
ont pour polaires deux côtés opposés AF
et CD de l'hexagone inscrit; donc la diagonale ad
est la polaire du point d'intersection I de ces
côtés,
donc elle renferme le pôle P de la droite IKL qui appartient
aux
points de concours des côtés opposés de
l'hexagone
inscrit, et par conséquent le point P est à la
fois le
croisement des trois diagonales qui joignet les sommets
opposés
de l'hexagone circonscrit.[...]
Dans tout
hexagone circonscrit
à une section
conique, les diagonales qui joignent deux à deux les sommets
respectivement opposés se croisent toutes trois en un
même
point.
Ce principe, non moins élégant et non moins
fécond
que celui de Pascal, et qui subsiste également quelle que
soit
la position respective des côtés de l'hexagone
autour de la courbe, appartient à M. Brianchon, qui l'a
démontré dans le XIII-ème Cahier de
l'École Polytechnique...
Le Grand
Théorème de PONCELET
Il clôture en
apothéose le Tome I. En voici l'énoncé
d'origine:
"Quand
un polygone est à la fois inscrit à une section
conique
et circonscrit à une autre, il en existe une
infinité de
semblables qui jouissent de la même
propriété
à l'égard des deux courbes; ou plutôt
tous ceux
qu'on essaierait de décrire à volonté,
d'après ces conditions, se fermeraient eux-mêmes
sur ces
courbes.
Et réciproquement, s'il arrive qu'en essayant d'inscrire à
volonté, à
une section conique, un polygone dont les côtés en
touchent une autre, ce polygone ne se ferme pas sur
lui-même, il ne saurait nécessairement y en avoir
d'autres
qui jouissent de cette propriété."
Le Grand
Théorème, pour des quadrilatères, puis
des hexagones, dans le Traité
de Poncelet
Voir la Planche
Complète
contenant cette figure.
Poncelet
étudie d'abord les triangles, puis les
quadrilatères, avant de généraliser de
manière assez rapide. C'est sans doute un peu optimiste,
car,
dit Marcel Berger, "Toutes
les démonstrations connues de ce
résultat sont assez cachées et longues." Il
est effectivement possible de faire une récurrence sur le
nombre
de côtés du polygone -ce que suggère le
texte de
Poncelet- mais les plus élégantes sont
basées sur
les correspondances algébriques de Chasles, ou, mieux
encore, la
théorie des fonctions elliptiques de Jacobi (1881).
Pour
approcher le Grand
Théorème ("Poncelet's Porism")...
Il y a d'abord, pour le
voir,
de nombreuses
Applets paramétrables
(conique, nombre de côtés...)
Il y aussi des textes:
- Une approche proposée par Jean-Pierre
Friedelmeyer (IREM de
Strasbourg)
- Quand
les matheux jouent au billard...ou le théorème de
Poncelet , par Marie Lhuissier (site web: Images des
Mathématiques, du CNRS)
- Une
page de Françoise PÉCAUT,
qu'on retrouve dans un "feuilleton"
téléchargeable au format pdf sur le site de la
Régionale APMEP de Marseille: «
Triangles et quadrilatères interscrits », Bull.
Rég. Aix-Marseille Vert numéro3, numéro4, numéro5, numéro6, numéro7
(année 2000).
- Une
page d'Eric Weisstein (Mathworld, Wolfram Research)
- l'approche elliptique, par S.
Ervedoza, G. Pouchin (2003)
- un livre numérisé: H. LAURENT, La Théorie
Élémentaire des
Fonctions Elliptiques (1880)
- A.G. GREENHILL, Les
Fonctions Elliptiques et leurs Applications (G.
Carré, rééd. J.Gabay)
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