Les Observations


Quelques panneaux présentent, dans le musée, les résultats d'Ulugh Beg et de son équipe, en comparant leurs précision à d'autres jalons historiques connus.

   1. La durée de l'année solaire



La ligne en rouge est celle d'Ulugh Beg (on transcrit parfois Ulug Bek!); les précédentes sont les valeurs de ???,???, Aristarque, Tabbit-ibn-Qurra. La dernière donne la valeur actuelle.

   2. La période des cinq autres planètes
La mesure est celle, exprimée en degrés d'arcs, minutes et secondes, de la portion de trajectoire parcourue pendant une anée "terrestre": Par exemple, la première ligne indique que Saturne parcourt environ 12° en 1 an; il lui faut donc bien 30 ans (environ!) pour boucler un tour sur son orbite.




Planète Valeur d'Ulugh Beg Valeur moderne
Difference
Saturne 12° 13' 39" 12° 13' 36" 3"
Jupiter 30° 20' 34" 30° 20' 31" 5"
Mars 191° 17' 15" 191° 17' 10" 5"
Venus 224° 17' 32" 229° 17' 30" 2"
Mercure 53° 43' 13" 53° 43' 3" 10"

(Version traduite du tableau, d'après le site de la Khwarzimic Science Society  conacré à Ulugh Beg)

   3. L'obliquité de l'écliptique
C'est, rappelons le, la mesure de l'inclinaison de l'axe de la terre par rapport à la perpendiculaire au plan de l'écliptique (plan du mouvement de la terre autour du soleil, ou, ce qui revient au même, mais correspond à la vision géocentrique en usage alors, du mouvement apparent du soleil autour de la terre)



Dans l'ordre des lignes, on lit les valeurs trouvées  par Eratosthène, Hipparque, Ptolémée, Al Battani, Al Sufi, Abu al Wafa, Al Quhi, Ibn Yunus, Al Tusi, et enfin Ulugh Beg lui même, ainsi que l'année d'obtention de ces valeurs (les deux premières, avant JC).

Le Catalogue des Etoiles

Sont présentées dans les vitrines quelques pages de son très célèbre Zij-i Sultani (Catalogue des Etoiles), paru en 1437 et recensant les positions de 992 étoiles, en langue arabe et en traduction anglaise, ainsi que des catalogues "comparatifs" où ses résultats sont confrontés à ceux d'autres astronomes célèbres; ce travail a été effectué par le premier astronome royal britannique, John Flamsteed (1646-1719), et publié peu après sa mort, en 1725 . (cliquer pour agrandir)

     
Un exemplaire en langue anglaise de ses tables (Oxford 1665) est conservé à la BNF; il faisait partie de l'exposition Ciel & Terre; une illustration  en est donnée dans le catalogue de l'exposition, mais  n'est pas disponible sur  le site Internet.
 
Cette reconnaissance internationale (fût-elle tardive) est bien mise en évidence par les allégories plaçant Ulugh Beg aux côtés des grands astronomes de l'Histoire: Hipparque, Ptolémée, Tycho Brahé...


Après une introduction dans laquelle il déclare s'appuyer sur les travaux antérieurs d'Al Sufi (903-986), il en revérifie, et au besoin corrige, les valeurs recueillies. Il possède cet ouvrage parmi l'abondante collection qu'il a réunie à la bibliothèque de l'Observatoire:


Al-Sufi, Traité des étoiles fixes
traduction latine anonyme, Bologne, XIIIe siècle Manuscrit sur parchemin (expo BNF Ciel & Terre)

C'est un point de départ très solide: pour ne citer qu'un exemple, Al-Sufi fut le premier à nommer "petit nuage" la Nébuleuse d'Andromède, qu'il observa et décrivit en 964 dans ce livre. Charles Messier ignorait cette antériorité et attribua la découverte à Simon Marius (1612). [voir les deux héros dans cette biographie]. Il est même probable que les astronomes persans la connaissaient depuis 905!


Le catalogue d'Ulugh-Beg s'organise en 4 parties:

  1. Description des differents systèmes de calcul des temps
  2. Practical Methodes pratiques d'observation et leur usage
  3. Mouvement apparent du Soleil, de la Lune et des Planètes
  4. Astrologie
La précision des tables astronomiques repose aussi sur une précision accrue des tables trigonométriques (qui figurent dans le catalogue), ce qui va conduire Al-Kashi à une innovation importante  sur le plan de la méthode (section suivante).
La quatrième partie peut laisser davantage perplexe, eu égard à l'opposition théorique de l'Islam à ce sujet. Voici ce qu'en dit Ahmed Djebbar dans Une Histoire de la Science Arabe [DJE]:

On ne s’étonnera pas de deux choses: en premier lieu, et malgré l’interdit prononcé par la religion contre la divination et la prédiction, l’astrologie astronomique n’a cessé d’être pratiquée tout au long du Moyen Age, comme en témoignent les centaines d’ouvrages publiés sur les différents thèmes de cette pratique. En second lieu, le souci de perfectionner cet outil de prédiction, en y introduisant les connaissances astronomiques les plus avancées de l’époque, va avoir un effet bénéfique sur le développement de l’astronomie.
Effectivement, cette discipline va profiter de l’engouement des hommes de pouvoir pour l’astrologie afin de bénéficier de leur aide financière, nécessaire à la réalisation de son «programme » scientifique (comme la construction de grands instruments astronomiques ou d’observatoires), ou bien pour solliciter leur protection contre des courants conservateurs hostiles à l’astronomie et à la philosophie.

Cette partie du Catalogue a été rééditée à l'occasion du 600-ème anniversaire de sa naissance. Sa couverture montre un portrait du prince savant, et la quatrième de couverture sa médersa.