Le site de Cnide
Arriver à Cnide...
Si l'on peut se permettre un conseil...
arrivez par
la mer! C'est facile, car la croisière en
goélette est une activité florissante sur la
côte sud du pays; ainsi vous découvrirez le
site dans toute sa majesté. Et vous partagerez
la sensation qu'Eudoxe, parti étudier
auprès d'
Archytas de Tarente,
éprouva lui-même
à son retour d'Italie...
Heureux qui, comme Eudoxe...
(Arrivée sous le petit théâtre -4500
places quand même!)
Privilège
et fortune du site, il possédait deux ports: le port de
commerce, aujourd'hui... de tourisme, et le port militaire, de l'autre
côté de l'ishtme. Rien n'a changé
à la disposition des lieux depuis l'Antiquité...
...Monter à la tholos d'Aphrodite...
La Belle n'est plus
là, vous le savez déjà: elle a disparu
lors d'un incendie; on ne la connait que par des copies Romaines. Mais
monter offre des vues splendides, et n'est-ce pas poursuivre notre
retour "dans les sandales du Mathématicien" ? C'est sans
doute par ce large escalier qu'il remonta vers la ville!
Imaginons, sous notre seule responsabililté, qu'il se rend
au sanctuaire d'Aphrodite (
Le
Jazz est un Roman, nous conte
Alain Gerber, alors... que
son admirateur essaie de vous convaincre que
les Mathématiques en
sont un autre!). Rendre hommage à la
beauté, quoi de plus naturel pour un
Mathématicien? Elle est son guide dans les calculs
complexes, sa vertu cardinale dans les démonstrations...
allons saluer sa déesse!
Le socle de la tholos
d'Aphrodite : on devine la forme circulaire, en l'absence de recul...
Derrière, le port militaire.
C'est donc ici que les Cnidiens -et pas qu'eux!- venaient admirer le
chef-d'œuvre
de Praxitèle (voir le
site
de l'exposition 2007 au Louvre). Car selon Pline l'Ancien,
"beaucoup ont fait le voyage
à Cnide pour la voir"... La forme circulaire du
temple était, merveille de la
Géométrie, d'une fonctionnalité
parfaite à cet égard: on pouvait faire le tour de
la statue et l'observer sous toutes ses ... faces. Les gens de Cnide
avaient eu l'excellente idée de prendre celui des deux
modèles proposés par l'artiste, que n'avaient pas
retenu les citoyens de l'île voisine de Kos, à
l'origine de la commande.
Aphrodite de Cnide, copie (Musée du Capitole, Rome) sur un bel octogone de marbre
... et redescendre vers le théâtre,
à la rencontre du cadran!
Ne nous laissons pas trop distraire... et revenons à notre
cadran, que nous apercevrons assez vite en nous dirigeant
vers le petit théâtre. Il devait se situer
à l'intersection de deux artères importantes,
tout en respectant un orientation plein sud: tant qu'à faire
d'être pratique!
Le cadran, tel qu'il
apparait pour la première fois au promeneur... en fait, de
dos!
( On domine, sur la gauche, le port de commerce )
... et son indispensable complice, sans lequel il ne peut fonctionner!
Le cadran
L'observation de sa cavité laisse apparaître des
lignes gravées, cercles et droites:
Il s'agit d'un type de
cadran relativement courant dans le monde Hellénistique
(puis Romain, par simple imitation), le cadran
conique d'axe polaire : c'est un cône de révolution, d'axe paralléle à l'axe de rotation de la terre); le
principe reste celui d'un cadran équatorial..
Schéma du
cadran; voir
ici plus
de détails de principe (page faisant
partie
de ce site).
Le style (perdu!)
était horizontal, son extrémité sur
l'axe du cône. Autrement ditl il ne s'agit pas d'un style
polaire: ce n'est pas l'axe du cône, mais il suffit d'y
placer un point, O sur le schéma.
Reconstitution
empirique: du style au ... stylo!
Le temps a manqué pour effectuer un positionnement exact de
l'extrémité...
Une
caractéristique de ce type de cadran est d'avoir des lignes
horaires régulièrement espacées, qui
sont des
génératrices du cône. Nous avons
essayé de
le vérifier sur les images, en prolongeant les
génératrices au delà du sommet du
cône. Ce
n'est certes pas un travail de précision... mais cette
petite
expérience montre assez bien ce qu'on attendait par la
théorie!
Vérification
expérimentale du type du cadran: le cône des
lignes
horaires (le sommet S est au dessus du plan horizontal!)
Pour ceux qui
voudraient voir l'évolution du tracé droite
après droite, ou presque:
étape
3,
étape
4,
étape
5,
étape
6.
Si -car ce
n'est pas
obligatoire!- le demi-angle au sommet du cône est
égal
à la latitude du lieu, soit aussi bien à l'angle
entre
l'horizontale et l'axe du cône, une
génératrice et
une seule sera horizontale... et
la section du
cône par un plan horizontal, c'est
à dire sa table supérieure,
parabolique!
Il semble bien que ce soit le cas pour le cadran
d'Eudoxe... ou
alors, on n'en est pas loin! (Un brave touriste prend avec lui plein de
matériel photographique... mais rien pour mesurer les
angles,
c'est sûrement un tort!)
Dans le plan horizontal, la
parabole (?) ou ellipse très allongée...
L'image met aussi en évidence la
génération réglée et la
verticalité de la ligne de midi.
Tout ceci
étant dit, il reste, au fond, la question historique
essentielle:
ce
cadran est-il d'Eudoxe, comme on nous le dit?
Les ruines sont considérées comme datant de l'
époque
Hellénistique, période
s'étalant du IV-ième siècle au I-er
siècle avant J.-C., ou, si l'on
préfère, entre la mort d'
Alexandre
le Grand et la conquête Romaine. Eudoxe meurt en
355, et Alexandre nait en... 356; c'est déjà un
peu juste!
En fait, ce type de cadran semble courant à cette
époque; et on le retrouve en de nombreux endroits du monde
méditérannéen: voir
cet article;
peut-on au moins attribuer la paternité du
modèle à Eudoxe? Une consultation rapide ne nous
a fourni aucune certitude, ni dans un sens, ni dans l'autre. On ne
prête qu'aux riches: il est sans doute tentant pour la ville
natale de l'astronome de revendiquer sa griffe... Le
Mathouriste se promet
d'enquêter de façon plus approfondie dans les
bibliothèques; mais si d'ici-là quelque expert en
gnomonique visite cette page et peut apporter des
précisions, elles seront reçues avec le plus
grand plaisir.
L'œuvre d'Eudoxe
Mathématicien, astronome, géographe, Eudoxe
laisse une œuvre importante, mais qu'on ne connait
qu'à travers ses successeurs, notamment Euclide. Pour nous
limiter à l'essentiel de ses contributions
mathématiques, nous citerons sans commentaire, mais avec des
liens (presque tous externes) choisis:
Références
-
R. D'HOLLANDER, Sciences
Géographiques dans l'Antiquité (IGN)
- G. LLOYD, Une Histoire de la Science Grecque (Points Sciences)