Repères ... GALILÉENS



Buste de Galilée
Musée Galilée (Florence)


Galilée, mathématicien? Nous le considérons sans doute davantage, aujourd'hui, comme un physicien. Mais ce serait oublier qu'il exerça très officiellement les fonctions de professeur de Mathématiques et d'Astronomie à Padoue, et qu'il fut l'un des premiers, pour ne pas dire LE premier, à faire sortir la Physique de la seule description qualitative des phénomènes pour la mathématiser. En douterait-on, il suffirait de lire les quelques célèbres lignes dans lesquelles il énonce ce principe (ci-dessous)  ou de regarder le titre de son dernier ouvrage (ci-contre).

Donc, Galilée dans nos pages... parce qu'il le vaut bien!
Et, pour l'intérêt littéraire, en compagnie d'extraits choisis de la célèbre pièce de théâtre de Bertolt Brecht, La Vie de Galilée (1939-1954).

 
Discours sur deux Sciences Nouvelles (1638)
" La philosophie (1)  est écrite dans ce très grand livre, toujours ouvert devant nos yeux, je veux dire l'Univers, mais on ne peut le comprendre si l'on ne s'applique d'abord à se familiariser avec sa langue et à connaître les caractères avec lesquels il est écrit. Il est écrit dans la langue mathématique et ses caractères sont des triangles, des cercles et autres figures géométriques, sans le moyen desquels il est humainement impossible d'en comprendre un mot."
Galileo Galilei, Il Saggiatore (1623)

1. sous entendu: [naturelle], c'est à dire la physique, selon la dénomination de l'époque; ce sera encore celle de Newton, pour son célèbre traité: Principes Mathématiques de la Philosophie Naturelle (1687)

Pise, les Premiers Pas

C'est dans cette ville qu'il est né (le 15/02/1564), quoiqu'issu d'une famille florentine. Sa maison natale est toujours là; et bien signalée. Mieux, il nous observe de la fenêtre, au deuxième étage!



Dans un premier temps, il reçoit son éducation dans le cadre familial, puis poursuit brièvement dans un couvent lorsque la famille retourne à Florence; il a alors 10 ans. En 1581, il retourne à Pise étudier la médecine, dont il se détourne assez vite au profit des mathématiques.
Cest là qu'il se révèle aussi physicien expérimentateur, dans le somptueux décor de la cathédrale... du moins si l'on en croît son élève et biographe enthousiaste, Vincenzo Viviani. Qui a peut-être quelque peu enjolivé les faits pour transformer l'histoire en légende... il ne serait ni le premier ni le dernier à agir de la sorte, mais, dûment avertis, abandonnons nous à la légende!
 



Cathédrale de Pise et son célèbre campanile,
sous le feu du soleil couchant
Tito Lessi, Galileo & Viviani,1892
Musée Galileo, Florence
Pietro Stoppioni, Portrait de  Viviani, 1806
         Musée Galileo, Florence
La Banque d'Italie ne s'y était d'ailleurs  pas trompé,  en choisissant, avant le Mathouriste, le même angle de vue pour  le monument...

     
Source: site de philatémie mathématique de Jeff Miller


En 1583, Galilée s'ennuie lors d'une messe un peu longue, et lève les yeux vers le lustre, qui oscille doucement, pendu au bout d'une longue chaîne. Il n'a qu'un chronomèttre de fortune: son propre pouls! Heureusement, celui-ci ne s'accélère pas sous l'émotion de sa découverte: la période du mouvement ne paraît pas dépendre de l'amplitude de l'oscillation! 






Rentré chez lui, il se hâte de réaliser des expériences. En bon expérimetateur, il essaie de multiples situations, mais en ne faisant varier qu'un seul paramètre à la fois!
- D'abord, utiliser diverses masses suspendues à un même fil de longueur fixe: la période ne varie pas, elle est donc indépendante de la ùasse!
- Ensuite, essayer des fils de longueurs différentes. Cette fois, la période varie, mais pas en proportion directe de la longueur: le pendule oscille deux fois plus vite lorsque le fil est quatre fois plus court!
Ces deux expériences, vous pouvez les visualiser dans cette vidéo.




Galilée observant les oscillations du lustre.
(peinture de Luigi Sabatelli), La Tribune de Galilée,
Museo La Specola, Florence


 

Isochrones, les oscillations? Indépendantes de l'amplitude d'écartement initial de la masse? Pas exactement! Cela ne tient que dans le cadre d'une approximation pour les mouvements de faible amplitude. C'est Huygens qui trouvera une élégante solution géométrique valable dans tous les cas... mais pas si pratique!



 Toujours rapportées par Viviani, le campanile est le théâtre de la fameuse expérience sur la chute des corps, grâce à sa célèbre inclinaison (1590). Celle-ci permet de suivre jusqu'au sol  la chute d'une bille  en terre  et d'un boulet métallique (le point crucial étant que chacun des deux objets n'offre qu'une prise négligeable à la résistance de l'air) lachés simultanément du haut de la tour, sans vitesse initiale. Et de constater qu'ici encore, la masse du corps n'a aucune influence!

Rentré chez lui, de nouveau, place à l'expérience, mais avec des plans inclinés. Une recherche qu'il poursuivra jusqu'en 1604.


Galilée fait aux Médicis une démonstration des lois de la gravité avec des plans inclinés.
Peinture de Guiseppe Bezzioli pour La Tribune de Galilée, Museo La Specola, Florence

Ci-contre, dispositif de mise en évidence expérimentale des espaces parcourus par une bille sur un plan incliné
(Musée Galileo, Florence)
Chaque passage sous un arceau déclenche une sonnette; on positionne les arceaux pour obtenir l'égalité des intervalles de temps: 1" entre deux arceaux, par exemple.
Ce dispositif provient d'un cabinet de physique (fin du XIXème siècle, probablement); pas sûr que Galiléeen  ait construit un aussi perfectionné!







En 1589 il devient devient professeur à l'Université de Pise, nommé par le grand duc de Toscane Cosme II, et tient son discours inaugural le 12/11/89

De Padoue à Florence

En 1592, le Sénat de Venise lui offre la chaire de mathématiques de la prestigieuse université de Padoue.     
En 1597, il perfectionne le Compas Géométrique & Militaire...
Mais pour son coup de maître, la lunette, laissons Bertolt Brecht nous présenter la scène. Il interviendra désormais dans tous les encadrés verts, par des extraits de sa célèbre pièce (1947)



Lunette de Galilée
Musée Galileo, Florence

LUDOVICO - [...] Prenez par exemple ce drôle de tube qu'ils vendent à Amsterdam.
Je l'ai bien examiné. Un étui en cuir vert et deux lentilles, une comme ça [concave], une comme ça [convexe] .J'entends dire que l'une agrandit et que l'autre rapetisse. Tout homme raisonnable penserait qu'elles se compensent. Faux. On voit tout cinq fois plus grand à travers cet objet.
GALILÉE -
Qu'est-ce qu'on voit cinq fois plus grand ?
LUDOVICO -  Des clochers, des pigeons; tout ce qui est loin.
GALILÉE - Avez-vous vu vous-même de ces clochers agrandis ?
LUDOVICO -  Oui, Monsieur Galilée.
GALILÉE - Et le tube avait deux lentilles? [Il trace une esquisse sur une feuille.] Ḉa ressemblait à cela? [Ludovico acquiesce] De quand date l'invention?
LUDOVICO - Je crois qu'elle n'avait pas plus de quelques jours quand j'ai quitté la Hollande, en tout cas elle n'était pas depuis plus longtemps sur le marché.

 Bertolt BRECHT, la Vie de Galilée, Tableau 1


GALILÉE - Votre Excellence, éminente Signoria! En tant que proesseur de mathématiques à votre université de Padoue et directeur de votre grand arsenal, ici à Venise, j'ai toujours considéré qu'il était de mon devoir, non seulement de satisfaire à ma haute charge professorale, mais enncore de procurer par des inventions utiles des avantages exceptionnels à la République de Venise. Avec une joie profonde et toute l'humilité  qui vous est due, je puis aujourd'hui vous présenter et vous remettre un instrument absolument nouveau, ma lunette ou télescope, fabriqué selon les plus hauts principes scientifiques et chrétiens, dans vote grand arsenal célèbre dans le monde entier, fruit de la recherche patiente de dix-sept années de votre humble serviteur. ,  
LE CURATEUR - Votre Excellence, éminente Signoria! Une fois de plus, une page glorieuse deu grand livre des arts se couvre de caractères vénitiens. [...] Et avez-vous songé qu'au moyen de cet instrument nous pourrons en temps de guerrre reconnaître le nombre et le genre des bateaux de l'ennemi deux bonnes heures avant qu'il ne puisse le faire des nôtres, et qu'ainsi nous pourrons, sachant sa force, nous décider à le poursuivre, le combattre, ou le fuir?

[........................]
LUDOVICO, gêné - Félicitations, monsieur.
GALILÉE - Je l'ai améliorée.
LUDOVICO - Certainement,  monsieur. J'ai vu que vous avez fait l'étui rouge. En Hollande, il était vert.
 Bertolt BRECHT, la Vie de Galilée, Tableau 2

Galilée présente sa lunette au Sénat de Venise.
 (peinture de Luigi Sabatelli)

La Tribune de Galilée, Museo La Specola, Florence



Source: site de philatémie mathématique de Jeff Miller


GALILÉE - Je ne peux pas te promettre que je supporterai jusqu'au bout ce carnaval. Ces gens-là s'imaginent avoir reçu un joujou qui va leur rapporter mais c'est bien davantage. La nuit dernière j'ai pointé cette lunette en direction de la lune.
SAGREDO - Et qu'as-tu vu?
GALILÉE - Elle ne brille pas par elle-même.
[...]
 
SAGREDO - Mais cela contredit deux mille ans d'astronomie!
GALILÉE - Exactement. Ce que tu vois, aucun homme encore ne l'a vu, excepté moi. Tu es le second.
SAGREDO - Mais la lune ne peut pas être une terre avec des montagnes et des vallées, pas plus que la terre ne peut être une étoile.
GALILÉE - La lune peut être une terre avec des montagnes et des vallées, et la terre peut être une étoile. Un corps céleste ordinaire, un parmi des milliers.

[...]
SAGREDO - Ainsi, il n'y aurait pas de différence entre la lune et la terre?
GALILÉE - Apparemment pas.
SAGREDO - Il n'y a pas dix ans qu'un homme a été brûlé à Rome. Il s'appelait Giordano Bruno et il avait précisément soutenu cela.
GALILÉE - Certes. Et nous, nous le voyons. Garde ton œil rivé à la lunette, Sagredo. Ce que tu vois, c'est qu'il ny a pas de différence entre la lune et la terre. Aujourd'hui, dix janvier 1610, l'humanité inscrit dans son journal: ciel aboli.

Bertolt BRECHT, la Vie de Galilée, Tableau 3 Bertolt BRECHT, la Vie de Galilée, Tableau 3
Monument à Giordano Bruno, Campo dei Fiori (Rome). Plaques du socle: le procès, le bûcher


N.B: l'irrégularité de la frontière ombre/lumière à la surface de la lune (voir, sur le timbre, la reproduction d'un dessin de Galilée) lui révèle l'existence de montagnes et de cratères, ce qui, pour commencer, met à mal la doctrine de l'autorité incontestée d'alors, Aristote, pour qui tous les corps célestes sont des sphères parfaites. Mais très vite, il va y avoir plus grave: la preuve qu'il n'y a pas dans le monde un centre unique, la Terre, autour duquel tourne tous les corps célestes. C'est donc le début de la preuve par l'observation de la théorie de Copernic, qui, assez peu diffusée encore, n'a pas fait l'objet dune interdiction.

Car il n'y a pas que la lune à observer à la lunette. Presqu'aussitôt, Galilée pointe l'instrument plus loin, vers Jupiter.. Toutes ces observations seront publiées très rapidement, dans un petit ouvrage, le Messager des Étoiles, le 13 mars 1610.


SAGREDO - Quand bien même la terre serait un corps céleste, on est encore loin des affirmations des Coperniciens soutenant qu'elle tourne autour du soleil. Il n'y a pas d'astre dans le ciel autour duquel un autre astre tourne. [...]
GALILÉE - Sagredo, je m'interroge. Depuis avant-hier, je m'interroge. Voici Jupiter. Il se trouve qu'il y a quatre étoiles plus petites près de lui, qu'on ne voit qu'à l'aide de la lunette. Je les ai vues lundi, mais je n'ai pas pris particulièrement note de leurs positions. Hier, je les ai de nouveau observées. J'aurais pu jurer que les positions des quatre avaient changé. Je les ai notées. Elles ont encore changé. Que se passe-t-il? J'en voyais pourtant quatre. [Agité] Regarde, toi!
SAGREDO - J'en vois trois.
GALILÉE - Où est la quatrième? [...] La quatrième ne peut être allée que derrière Jupiter où on ne la voit pas. Le voilà, ton astre autour duquel aucun ne tourne!
[........................]
SAGREDO - Calme toi! Tu penses trop vite!.
GALILÉE - Comment, vite!  Réveille toi, l'homme! Ce que tu vois, personne encoure ne l'a vu. Ils avaient raison!
SAGREDO - Qui? Les Coperniciens?
GALILÉE - Et l'autre aussi! Le monde entier était contre eux, et ils avaient raison.
[........................]

 
Positions notées (schématiquement)
par Galilée dans le
Sidereus Nuncius (le Messager des Étoiles, 1610)



Positions notées en 1668 par Cassini, avec plus de précision.
(Observatoire de Paris)


SAGREDO - As tu perdu la raison? Ne sais-tu vraiment plus à quoi tu t'exposes si ce que tu vois là est vrai? Et si tu dis sur toutes les places que la terre est un corps céleste et n'est pas le centre de l'univers?
Et où est Dieu, alors?
GALILÉE - Suis-je théologien? Je suis mathématicien.
SAGREDO - Avant tout, tu es un homme. Et je te demande où est Dieu dans ton système du monde?
GALILÉE - En nous et nulle part!
SAGREDO - Comme l'a dit celui qu'on a brûlé?
GALILÉE - Comme l'a dit celui qu'on a brûlé!
 SAGREDO - C'est pourquoi on l'a brûlé! Il n'y a pas six ans de celà!
GALILÉE - Parce qu'il ne pouvait rien prouver! Parce qu'il l'affirmait seulement!
SAGREDO - Galilée, je t'ai toujours connu homme adroit. Dix-sept ans durant à Padoue et trois ans à Pise, tu as enseigné patiemment à des centaines d'élèves  le système de Ptolémée prôné par l'Église et attesté par l'Écriture sur laquelle repose l'Église. Avec Copernic, tu l'as tenu pour faux, mais tu l'as enseigné.
GALILÉE - Parce que je ne pouvais rien prouver.
SAGREDO - Et tu crois que cela fait une différence?
GALILÉE - Toute la différence! Vois, Sagredo, je crois en l'homme, et cela signifie que je crois en sa raison!

SAGREDO - Alors, je vais te dire quelque chose: moi je n'y crois pas. Quarante ans parmi les hommes m'ont enseigné sans cesse qu'ils ne sont pas accessibles à la raison. Montre leur la queue rougeoyante d'une comète, inspire leur une sourde angoisse, et ils sortiront de leurs maisons en courant à se rompre les jambes. Mais dis leur une phrase raisonnable, et prouve la sept fois par la raison, et ils riront tout simplement de toi.
 Bertolt BRECHT, la Vie de Galilée, Tableau 3


Passer par Jupiter va devenir, pour Galilée, le plus court chemin... pour retourner à Florence! Ce qui n'est pourtant pas sans risque, car la République de Venise, dont dépend Padoue, est plus autonome  vis à vis de la Papauté que ne l'est le Duché de Toscane... et le toujours sage Sagredo ne manque pas de le lui rappeler pour conclure ce troisième tableau:


Galilée, "la lunette à la main" ,
par Aristomedo Costoli.
Galerie des Offices, Florence
(extérieur)


VIRGINIA
[Fille de Galiléee] - N'as tu plus rien vu de neuf dans le ciel avec ça?
GALILÉE -
Rien pour toi. Juste quelques petites tâches ternes du côté gauche d' une grande étoile. Il va falloir de quelque manière  que j'attire l'attention sur elles. [à Sagredo] Je vais peut-être les baptiser "astres médicéens" du nom du grand duc de Florence. [à Virginia] Cela t'intéressera, Virginia, de savoir que nous allons sans doute déménager à Florence. J'ai écrit une lettre là-bas pour demander si le grand duc pouvait avoir besoin de moi comme mathématicien à la cour.
[........................]
SAGREDO - Ne va pas à Florence, Galilée.
GALILÉE - Pourquoi?
SAGREDO - Parce que les moines y règnent.
GALILÉE - Il y a des savants renommés à la cour de Florence.
SAGREDO - Des laquais.
GALILÉE - Je les prendrai par la peau du cou et je les traînerai devant la lunette. Les moines aussi sont des hommes, Sagredo. Eux aussi succombent à la sédiuction des preuves .Copernic, ne l'oublie pas, exigeait d'eux qu'ils croient en ses chiffres, mais moi, j'exige simplement qu'ils croient en leurs yeux.
SAGREDO - Galilée, je te vois engagé sur un chemin terrible. C'est la nuit du malheur, celle où l'homme voit la vérité. Et l'heure de l'aveuglement, celle où il croit en la raison humaine. [...] Comment les puissants pourraient ils laisser courir en liberté quelqu'un qui sait la vérité, ne serait-ce qu'une vérité touchant les axtres les plus éloignés! Penses tu que le pape entendra ta vérité quand itu dis qu'il se trompe, sans pour autant entendre qu'il se trompe? [...] Comment peux tu vouloir quitter cette République, la vérité dans la poche, pour te jeter dans les pièges des princes et des moines, ta lunette à la main? Toi si méfiant dans ta science, tu es crédule comme un enfant pour tout ce qui te semble faciliter sa pratique. [...] et quand tu disais que tu croyais dans tes preuves, j'ai humé l'odeur de la chair brûlée. J'aime la science, mais toi plus encore, mon ami. Ne va pas à Florence, Galilée.

 Bertolt BRECHT, la Vie de Galilée, Tableau 3

Galilée ne tient pas compte de ce sage conseil, et vient habiter à Florence. Sa maison, dans le quartier de l'Oltrarno, est indiquée par une plaque commémorative, et la troisième du groupe se signale par des fresques et une inscription reprenant les propos du Grand Duc de Toscane Ferdinand  II.









Les Dialogues...

Copernic interdit 

Galilée n'a pas attendu les preuves fournies par ses observations à la lunette pour se faire copernicien convaincu: l'extrait de lettre qui suit le prouve sans équivoque:

" [...] depuis bien des années déjà, je me suis rallié à  la doctrine de Copernic [...]. J'ai écrit sur ce sujet bien des études, avec de nombreuses réfutations des argumentations contraires, mais jusqu'à présent je  n'ai pas osé les publier ouvertement, effrayé par le sort de Copernic notre maître, qui s'est assuré une gloire immortelle auprès de quelques uns, mais s'est aussi exposé au mépris et à la dérision d'une infinité d'autres, tant il y a de sots. J'aurais le courage de de publier mes idées s'il existait assez d'hommes comme vous; mais puisqu'il ny en a pas, je préfère attendre."
Galileo Galilei, lettre à Kepler (4/08/1597)

 
À la date de cette lettre, Galilée, cela fait un peu plus d'un demi-siècle que le De Revolutionibus de Copernic circule sans entrave, rapidement mais dans des milieux érudits, soit des cercles très étroits. Et au moment où Galilée exhibe sa lunette devant le Sénat de Venise, Képler vient de publier son Astronomia Nova (1609), qui contient ses trois fameuses lois, dont la deuxième affirme le mouvement elliptique des planètes autour du soleil. Sans plus de réaction de l'Église. En 1611, à Rome, il a pu présenter ses vues devant le Collège Romain (l'institution jésuite qui définit l'enseignement que donneront les collèges de la Confrérie), et il a été reçu membre de la prestigieuse Accademia dei Lyncei. Avec deux cardinaux très haut placés, qui vont jouer un rôle décisif dans la suite, Robert Bellarmin et Maffeo Barberini, les relations sont cordiales, voire amicales: on échange des idées entre érudits éclairés. En apparence, tout va pour le mieux...
 

BARBERINI, pointant l'index vers Galilée - «Le Soleil se lève et se couche et revient au lieu d'où il se lève» Voilà ce que dit Salomon, et que dit Galilée?
GALILÉE - Alors que je n'étais pas plus grand que ça [en indiquant la taille de sa main], Votre Éminence, je me trouvauis ur un bateau et j'ai crié: le rivage s'en va. Aujourd'hui je sais que le rivage était immobile et que c'est le  bateau qui s'en allait.
BARBERINI - Habile, habile. [...] Ses lunes de Jupiter tout de même sont dures  à avaler pour nos astronomes. J'ai malheureuselent étudié autrefois un peu d'astronomie, Bellarmin. Cela vous poursuit comme la gale.
BELLARMIN - Soyons de notre temps, Barberini. Si des cartes du ciel, qui se fondent sur une hypothèse nouvelle, facilitent la navigation de nos marins, qu'ils utilisent ces cartes. Seules nous déplaisent les théories qui rendent l'Écriture fausse.

 
Robert Bellarmin, église du Gesù, Rome
(source : Wikimedia Commons)


Maffeo Barberini, Musée du Capitole, Rome
(source : Wikimedia Commons)


GALILÉE -
l'Écriture. «Celui qui accapare le blé, le peuple le maudira.» Proverbes de Salomon.
BARBERINI - «Le sage dissimule son savoir.» Proverbes de Salomon.
GALILÉE - «Là où sont les bœufs, l'étable est souillée. Mais on tire grand profit de la force des bœufs
BARBERINI - «Celui qui sait brider sa raison vaut mieux que le preneur de ville.»
GALILÉE - [...]  «La vérité ne crie-t-elle pas haut et fort?
BARBERINI - «Peut-on poser le pied sur des charbons ardents et ne pas se brûler le pied?» Bienvenue à Rome, ami Galilée

Bertolt BRECHT, la Vie de Galilée, Tableau 7

Toutefois, en 1615, Bellarmin a été chargé d'un rappel à l'ordre envers un autre copernicien déclaré, le père Foscarini. Le discours est argumenté (Bellarmin est un jésuite), le ton est modéré... mais ferme. Et si Galilée n'est pas cité, il peut aussi bien prendre pour lui cette mise au point:

" [...]  S'il y avait une vraie preuve que le Soleil est au centre de l'Univers, que la Terre se trouve dans la troisième sphère et que le Soleil ne tourne pas autour de la Terre, mais la Terre autour du Soleil, alors il faudrait entreprendre avec une grande circonspection d'expliquer les passages de l'Écriture qui paraissent enseigner le contraire, et nous devrions dire que nous ne les comprenons pas plutôt que de déclarer fausse une opinion démontrée comme vraie. Mais je ne crois pas qu'il y ait une telle preuve, puisqu'on ne m'en a pas présenté."
Robert BELLARMIN, lettre à Foscarini (4/04/1615)


Galilée, à la même époque, sait que certains n'hésitent plus à l'attaquer publiquement... hors de sa présence: la calomnie est en route, comme la décrit si bien Beaumarchais (Le Barbier de Séville, acte II, scène 8); il s''en ouvre par écrit à Christine de Lorraine, épouse de son protecteur le Duc de Toscane? en plaidant pour une dissociation de la physique et de la religion, un point de vue très moderne!

Ces adversaires cherchent par tous les moyens possibles à me déconsidérer. Ils savent que mes études d'astronomie et de philosophie m'ont conduit à affirmer, relativement à la constitution du monde, que le Soleil, sans changer de place, demeure situé au centre de la révolution des orbes célestes et que la Terre tourne sur elle-même et autour du Soleil. [...].
Ils en sont venus à prétendre que mes propositions sont contraires aux Saintes Écritures et qu'en conséquence elles sont condamnables et hérétiques. Ils n'ont pas eu de peine à trouver quemlqu'un qui eut l'insolente audace de le proclamer du haut de la chaire et d'étendre cette accusation sur les mathématiques entières et les sur tous les mathématiciens; devenus plus sûrs d'eux mêmes, ils insinuent maintenant parmi le peuple la croyance que l'autorité suprême interviendra bientôt dans cette affaire. [...]ils cherchent à faire croire que mon opinion est entièrement nouvelle et qu'elle m'est propre,dissimulant que Nicolas Copernic en est l'auteur. [...]
Si les conclusions physiques vraiment démontrées n'ont pas besoin d'être subordonnées aux passages bibliques, si au contraire il faut montrer que ces derniers ne s'opposent point à celles-ci, en ce cas avant qu'une proposition physique soit condamnée, il faut montrer qu'elle n'est pas rigoureusement prouvée, et cela doit être fait non par ceux qui tiennent la
proposition our vraie, mais par ceux qui la jugent fausse."
Galileo Galilei, lettre à Christine de Lorraine (1615)


L'histoire s'accélère: le 24 février 1616, le Saint Office condamne l'héliocentrisme; le décret mettant l'ouvrage de Copernic à l'index sera publié le 5 mars. Mais dès
le 25 février, le pape Paul V charge Bellarmin de notifier à Galilée la prescription d'abandonner toute prise de position en faveur du système de Copernic, ce dont il s'acquitte le lendemain



Paul V, par G.L. Bernini

Musée Getty, Los Angeles

BELLARMIN - Monsieur Galilée, le Saint-Office a décrété cette nuit que la théorie de Copernic, selon laquelle le soleil est au centre du monde et immobile alors que la terre n'est pas le centre du monde et se meut, est folle, absurde, hérétique au regard de la foi. J'ai mission de vous exhorter à renoncer à cette opinion.
GALILÉE - Mais j'avais cru comprendre que les astronomes du Collegium Romanum avaient reconnu la réalité de mes observations.
BELLARMIN
- Avec l'expression de la plus profonde satisfaction, et de la manière la plus honorable pour vous.
[........................]
GALILÉE - Cela signifie que toute recherche scientifique ultérieure...
BELLARMIN - Est pleinement garantie, monsieur Galilée. Et cela conformément à la doctrine de l'Église qui dit que nous ne pouvons pas savoir mais sommes libres de chercher. Vous êtes libre d'étudier même cette théorie-là, mais sous forme d'hypothèse mathématique. [...] Personne d'entre nous ne suppose sérieusement que vous voulez saper la confiance en l'Église. 
 Bertolt BRECHT, la Vie de Galilée, Tableau 7

  Les ragots ne cessent pas pour autant; Galilée, pour une fois prudent, obtient de Bellarmin un certificat mettant les choses au point.

" Nous, Roberto, cardinal Bellarmino, ayant été informé que l'on raconte de façon calomnieuse que M. Galileo Galilei a abjuré entre nos mains et aussi qu'il llui a été imposé une pénitence salutaire, et étant requis de proclamer la vérité à ce propos, déclarons que ledit Galilée n'a abjuré, ni entre nos mains ni entre celles de quiconque ici à Rome, ni ailleurs à notre connaissance, aucune opinion ou doctrine soutenue par lui ; et qu'aucune pénitence salutaire ne lui a été imposée. Mais seulement que lui a été notifiée la déclaration faite par le Saint-Père et publiée par la Sacrée congrégation de l'Index, en laquelle il est dit que la doctrine attribuée à Copernic [...] est contraire à la Sainte Écriture, et ne doit donc être ni défendue ni soutenue. En foi de quoi nous avons écrit et oaraophé de notre main les présentes, ce vingt-sixième de mai 1616."
Robert BELLARMIN, lettre à Foscarini (26/05/1615)


Mais ce sera, lors de son procès, une pièce à double tranchant: certes, il n'a pas été condamné, mais il a été clairement averti, et cest sous cet avertissement qu'il écrira ses Dialogues ouvertement coperniciens sous une façade de présentation impartiale des deux systèmes.

Le Livre de Galilée 

En 1623, élection d'un nouveau pape... Tous les espoirs seraient-ils permis?

GALILÉE - D'autres nouvelles de la ville sainte, hors le fait d'espérer quelques nouveaux pêchés de ma part?
LUDOVICO - Naturellement, vous savez que le Saint-Père est à l'agonie?
GALILÉE - De qui parle-t-on pour lui succéder?
LUDOVICO - Le plus souvent, de Barberini.
GALILÉE - Barberini.
ANDRÉA - Monsieur Galilée connaît Barberini.
LE PETIT MOINE - Le cardinal Barberini est mathématicien.
FEDERZONI - Un homme de science sur le Saint-Siège!
[Un temps]
GALILÉE - Voilà qu'à présent, ils ont besoin d'hommes comme lui, qui ont lu un peu de mathématique! Les chose commencent à bouger. Federzoni, nous allons peut-être finir par vivre un temps où nous n'aurons plus à regarder autour de nous comme des criminels pour dire que deux et deux font quatre.
 Bertolt BRECHT, la Vie de Galilée, Tableau 9

L'année suivante, ce nouveau pape recevra 6 fois Galilée en audience. Parlent-ils du décret frappant d'hérésie l'héliocentrisme? Sans doute, mais Galilée n'obtient pas son retrait. Discuter avec un ami éclairé est une chose, obtenir un acte concret du Chef de l'Église en est une autre...


Quoi qu'il en soit, Galilée se sent en confiance pour écrire une présentation  où  se confrontent les deux modèles mathématiques du système solaire: celui, géocentrique de Ptolémée, et le nouveau, héliocentrique, de Copernic.

Le pape a donné son accord... pourvu que le texte reste neutre et équilibré, sans jamais prendre parti pour l'un des deux..


Les deux modèles côte à côte,  dans l'atlas de Matthaüs Seutter (1734).
Le système "mixte" de Tycho Brahé y apparaît  également.


[exposition Copernic à la Bibliothèque Polonaise de Paris, Mai 2024]




Édition présentée à la maison natale de Copernic, à Torun (Pologne)

Au lieu de faire voir les protagonistes en pleine discussion comme l'editio princeps, elle leur a substitué Aristote (à gauche), Ptolémée, au centre, tenant une sphère armilliaire dseon son modèle gépcentrique, et Copernic (à droite),

Il choisit la forme d'un dialogue entre trois protagonistes:
- Sagredo, un "honnête homme",  qui veut comprendre, écouter patiemment les arguments de chacun des deux autres protagonistes défendant leur système préféré;
- Salviati, un jeune et brillant intellectuel acquis aux idées nouvelles de Copernic;
- Simplicio, un Aristotélicien, homme plutôt simple.. -ou parfois simplet? - qui ne doute pas de ce qui lui saute aux yeux: c'est le Soleil qui, allant d'Est en Ouest dans la journée, tourne autour de la Terre.

Les deux premiers ont existé, ou du moins ont eu des modèles réels: Galilée a emprunté les traits de deux de ses amis. Mais le troisième est inventé, et le polémiste qui sommeille -d'un œil seulement!- en Galilée ne va pas tarder à en faire une caricature, sans cesse ridiculisée. Et c'est bien le problème: la promesse d'une présentation neutre ne sera jamais tenue, et Salviati n'est qu'un masque transparent pour le copernicien Galilée!

Et si l'on peut voir dans cette forme une référence à Platon, comment oublier que par le dialogue, c'est toujours "Socrate qui gagne", tirant le naïf de son erreur et l'instruisant patiemment?

Une petite mise au point mathématique: Ptolémée vs Copernic en tant que modèle mathématique

Il faut bien distinguer deux choses:
- la réalité physique (expliquer les phases de Vénus, le mouvement des satellites de Jupiter, la rétrogradation de Mars, le mouvement  apparent de Vénus dans un angle limité vu de la Terre...) : à tout cela, le modèle de Copernic seul fournit une explication simple que celui de Ptolémée est incapable de justifier. Sur ce plan, il est légitime de ridiculiser les tenants de la lecture trop à la lettre de la Bible (Joshua arrêtant le Soleil dans sa course...), Simplicio et ses semblables;
- la prédictibilité du modèle mathématique pour évaluer les positions futures des objets (vus de notre onbservatoire naturel, la Terre).

Et à ce titre, le modèle de Ptolémée fonctionne parfaitement, et probablement mieux que celui de Copernic. Car son système, certes compliqué de superposition d'épicycles est en fait une préfiguration géométrique du développement en série de FOURIER:
z = c1 eiωt  + c2 eit  + c3 ei3ωt + ...
chaque troncature constituant une approximation de plus en précise.
En effet, pendant que Galilée se débat contre la censure, Képler a démontré que les trajectoires ne sont pas circulaires mais elliptiques -ce qu'ignorait Copernic- tout en demeurant périodiques et régulieres (pas de saut brusque des vitesses ou des accélérations). Hypothèses qui suffisent (mais bien sûr, on ne le saura que plus tard) pour pouvoir approcher à toute précision choisie le mouvement réel par une approximation trigonométrique.
Autrement dit, on s'approchera d'aussi près que l'on veut du mouvement réel en "entassant" de plus en plus d'épicycles!

Plus de détails techniques dans notre page spéciale consacrée à une Brève Histoire des Séries de Fourier.





La gestation du projet est longue: l'ouvrage ne paraît qu'en 1632, quoique l'auteur ait écrit en 1629 qu'il ne lui restait plus que quelques détails de liaison à lui apporter. De fait, en cette même année 1629, le père Marin Mersenne, "la boîte à lettres de l'Europe" (scientifique) lui avait offert de le faire publier à Paris. Et cela lui aurait évité bien des tracas!

Curieusement, la censure n'y trouve rien à redire dans un premier temps: l'ouvrage reçoit l'imprimatur de l'Inquisiteur de Florence et de celui de Rome. Mais ce répit est bref: le 21 juillet 1632, le père dominicain Riccardi leur transmet l'ordre d'Urbain VIII d'interdire la vente du livre... et de confisquer ceux qui ont déjà été acquis!

Marin Mersenne, entre Desargues (de face) et Pascal (de dos).
Détail d'une peinture intérieure de la Srbonne, voir notre page.

Rome, les Ennuis...

L'affaire ne traîne pas; tout se passe comme si Urbain VIII voulait au plus vite asseoir son autorité pontificale tout en ménageant discrètement l'ancien ami. C'est une question de raison d'État, pas de relation personnelle: il y a changement d'échelle. L'ouverture d'un procès est décidée le 23 septembre 1632, Galilée est convoqué à Rome le 1er Octobre, mais les précautions de quarantaine léiées à une épidémie de pesteretardent les débats, qui se dérouleront entre le 12 avril et le 22 juin 1633.


Une salle du Vatican - Le pape Urbain VIII -anciennement cardinal Barberini- reçoit le cardinal Inquisiteur. Durant l'audience, on l'habille.

LE PAPE, d'une voix très forte - Non, non, non!
L'INQUISITEUR
- [...]Votre Sainteté veut-elle annoncer que l'Écriture ne saurait plus longtemps être tenue pour vraie?
LE PAPE - Je ne laisserai pas briser les tables de l'Arithmétique. Non!
[........................]


Image extraite de la scène de l'habillage du Pape (Tableau 12)

Misée en scène de Claudia Stavisky, 2019; Philippe Torreton y joue Galilée

Voir la scène en entier

LE PAPE - Cet homme tout de même est le plus grand physicien de ce temps, la lumière de l'Italie et non quelque esprit confus. Il a des amis. Il y a la cour de Versailles. Il y a la cour de Vienne. Ils vont appeler l'Église une fosse à purin de préjugés pourris. N'y touchez pas!
L'INQUISITEUR
- Pratiquement, il n'y aurait pas besoin de pousser les choses loin avec lui. C'est un homme de la chair. Il capitulerait tout de suite. de la plus profonde satisfaction, et de la manière la plus honorable pour vous.
LE PAPE - [...] Et puis je ne veux pas de coldamnation des preuves matérielles qu'il avance, pas de cri de guerre comme «Ici l'Église!» et «Ici la Raison!» J'ai autorisé son livre s'il reflétait à la fin l'opinion que le dernier mot n'appartient pas à la science, mais à la foi. Il s'y est tenu.
L'INQUISITEUR - Mais de quelle manière? Dans son livre disputent un homme stupide qui naturellement défend les idées d'Aristote et un homme intelligent qui tout aussi naturellement défend les idées de monsieur Galilée, et cette umtime opinion, votre Sainteté, qui la profère?
LE PAPE - [...] Qui soutient donc la nôtre?
L'INQUISITEUR - Pas l'homme intelligent.
LE PAPE - Cest une impertinence évidemment [...]
En toute dernière extrémité, qu'on lui montre les instruments.

L'INQUISITEUR - Cela suffira, Votre Sainteté. Monsieur Galilée s'y connait en matière d'instruments.

 Bertolt BRECHT, la Vie de Galilée, Tableau 12


L'INDIVIDU - Monsieur Galilée sera bientôt là. Il aura sans doute besoin d'un lit.
FEDERZONI -
On l'a libéré?
L'INDIVIDU - On attend la rétraction de monsieur Galilée pour cinq heures, au cours de l'audience de l'Inquisition. On sonnera la grande cloche de Saint-Marc et on proclamera publiquement les termes de sa rétraction.
ANDRÉA - Je ne le crois pas. [...]

FEDERZONI regarde le cadran solaire dans le jardin. Cinq heures. [...]
FEDERZONI, d'une voix rauque - Rien. Cinq heures sont passée de trois minutes.
ANDRÉA - Il résiste.
LE PETIT MOINE - Il ne se rétracte pas. [...]

À cet instant la cloche de Saint-Marc commence à retentir. [...] On entend dans la rue le crieur public lire la rétraction de Galilée.

ANDRÉA, à voix haute - Malheureux le pays qui n'a pas de héros!
Galilée est entré, totalement changé, rendu presque méconnaissable par le procès. Il a entendu la phrase d'Andréa. [...]
ANDRÉA - Je ne peux pas le regarder. Qu'il parte.
FEDERZONI - Calme toi.
[...]
GALILÉE - Non. Malheureux le pays qui a besoin de héros.
 Bertolt BRECHT, la Vie de Galilée, Tableau 13



< en travaux! >



















Hommages Posthumes

D'abord, la Sépulture...



Décédé le 8 janvier 1642, Galilée a été inhumé dans la basilique Santa Croce de Florence.

Ferdinand II de Médicis souhaitait lui faire construire une tombe monumentale, mais le Pape -toujours Urbain VIII- et le cardinal Bellarmin s'y opposèrent puisqu'abjuration ou pas, il avait été quasiment convaincu d'hérésie.  

Son fidèle disciple Vincenzo Viviani avait tenté, mais en vain, de vaincre cette résistance; ce n'est qu'après sa mort, en 1737, que le corps de Galilée fut enfin transféré de sa première sépulture au grand mausolée de marbre... qui est en général le seul mentionné par les guides (aux deux sens du mot, autant les livres que les personnes).  






Santa Croce, telle qu'on la voit aujourd'hui,
mais sa façade de marbre ne remonte qu'à 1863
Santa Croce, telle qu'elle était à l'époque de Galilée
Musée de l'œuvre de la basilique

Commençons donc par regarder l'imposant  tombeau de marbre, dans la basilique.






Alors que la "muse" de gauche présente une dfeuille sur laquelle rayonne un soleil -sans doute une allusion aà la découverte des tâches solaires, celle de droite présente une tablette où est gravé un croquis géométrique, figure réalisée dans le cadre de l'étude de la chute des corps. Ainsi, l'allégorie illustre le texte, qui fait de Galilée un géomètre autant quun astronome... sans oublier le philosophe! 


Mais le Mathouriste a réussi à passer quelques brefs instants face à  la première tombe, qui, en principe, n'est pas accessible aux touristes! L'accès à la chapelle des Médicis est libre, et même, un panneau très discret près d'une petite porte, au fond et à gauche, signale que derrière, dans une chambre minuscule  se trouve la sépulture initiale. En voici donc quelque images rares...Approchez, et entrez!






 Sur la vignette ci-dessus, on a fléché en rouge la porte de la pièce, et entouré en vert le texte de présentation. En agrandissant les images par clic, vous verrez la chapelle sans ces repères, et vous pourrez lire le texte, ainsi que le texte figurant sous le buste.   

l'acte de décès

... ensuite, la Tribune...

Il s'agit d'un ensemble commémoratif édifié en 1841 sur ordre du Grand Duc Léopold II (1797-1870), situé au premier étage du musée La Specola (dans l'Oltrarno, à côté du Palais Pitti); à l'origine musée des sciences, il est consacré aujourd'hui à la zoologie et l'histoire naturelle.
Du point de vue architectural, le visiteur rencontrera trois pièces successives: un vestibule où l'on pénètre après avoir monté l'escalier, puis une salle carrée qui, à l'origine, était vouée à l'exposition d'objets liés à l'activité du savant, et enfin la tribune proprement dite, de plan au sol semi-circulaire, qui ferme le tout. Suivons donc le parcours dans son ordre naturel.




Léonard de Vinci vient se présenter à Ludovic Sforza "il Moro"
Fresque de Nicola Cianfianelli


Alessandro Volta fait la démonstration de sa pile au Premier Consul Bonaparte, en 1801; à l'Académie des Sciences de Paris. Fresque de Gasparo Martellani


Pénétrons maintenant dans la salle quadrilatérale (quasiment carrée au sol); déjà, au  fond, apparaît la fameuse tribune... La salle est décorée de macarrons à l'effigie des disciples du maître (Viviani et Cassini étant les deux plus notoires)  et de deux "lunettes"ovales sur les murs latéraux: l'une, à gauche, représente l'expérience de la chute des corps (voir plus haut, à la fin du § Pise) ; l'autre, à droite, une réunion de l'Accademia del Cimento.




Réunion de l'Accademia del Cimento
Fresque de Gaspero Martellini


La salle peut, aujourd'hui, paraître assez vide... mais il ne faut pas oublier qu'elle était, à l'origine, une salle d'expositions de divers instruments de physique. Ils ont aujourd'hui rejoint le Museo Galileo, telles ces diverses lunettes, fabriquées par Galilée, ses disciples (notamment Toricelli) ou d'autres facteurs de la même époque.

Le plafond est particulièrement travaillé (Noter que du point de vue géométrique, il s'agit d'une intersction de cylindres, qu'on pourrait croire décomposée en deux ellipses, dans la mesure om la dsalle est perçue comme carrée... mais ce n'est pas tout à fait le cas: 6,86m en profondeur pour 7,22m en largeur)

La décoration comporte deux figures allégoriques en médaillon: la Mathématique (à gauche sur nos images) et l'Astronomie (à droite). Elles sont l'œuvre de Luigi Sabatelli.



Et voilà enfin, dans l'hémicycle qui termine cette enfilade, Galilée entouré de ses quatre principaux disciples, et surmonté d'un dôme où sont évoqués trois grands moments de sa vie scientifique.




Fresques de Luigi Sabartelli. De gauche à droite:
Galilée réfléchit devant le lustre oscillant du Duomo de Pise;

Galilée présente sa lunette au Sénat de Venise;
Galilée, vieux et aveugle, converse avec ses élèves.



À gauche de la statue de Galilée:
Castelli, Cavalieri

statue, par Aristodemo Costoli      

Détail: figures de géométrie,
dont une parabole (chute des corps)


À droite de la statue de Galilée:
Toricelli, Viviani

Au pied de la statue, juste à l'avant de l'hémicycle, une allégorie de la démonstration... et bien sûr, le thème choisi est le théorème de Pythagore! On reconnaît, sur la tablette que tient le personnage à gauche, la célèbre figure des Éléments d'Euclide.




u

pilier gauche
Enfin, les piliers à l'entrée ont reçu des décors en stuc, évoquant diverses "inventions" attribuées (parfois un peu généreusement!) à Galilée: on reconnait sur le pilier gauche la lunette en haut, et le compas de proportion en bas (fans ces deux cas, il s'agit plutôt de perfectionnement). Ádroite, le pendule et son thermomètre.


pilier gauche, détail central

pilier droit, bas

pilier droit, haut

... et Tout le Reste!

à Florence

Il n'est pas surprenant de croiser Galilée en d'autres lieux de sa ville... et tout d'abord, sur la rive de l'Arno, à la Bibliothèque Nationale Centrale de Florence. Le bâtiment est d'une élégance... assez moyenne, mais dominé par deux "niches", l'une abritant notre héros (lunette à la main, bien évidemment!), l'autre Dante Alighieri, également natif de la cité: beau symbole de la présence des sciences et des lettres. On retrouve la tête de Galilée dans un médaillon décoratif.





Mais il est aussi présent... au fronton de la demeure de son disciple Viviani, le   célèbre Palais des Placards, qui figure en bonne place des curiosités recommandées de la ville... sans qu'on fasse, la plupart du temps,  allusion à son illustre propriétaire!


 
Les "Placards" encadrant l'entrée, doù le nom du palais
Détail : buste de Galilée au dessus de la porte


Bien sûr, on le retrouvera dans "son " musée -qui est, de manière plus générale, un musée des sciences, le Museo Galileo (site officiel , avec beaucoup de pièces de sa collection à voir en ligne... même si, bien sûr, rien ne vaut une visite sur place). Nous l'y verrons seul... ou en compagnie de son fidèle Viviani!



Tito Lessi, Galileo & Viviani, 1892
On trouvera un monument mémorial bien plus récent à une sortie de la ville, toujours le long de l'Arno. Cette stèle est un hommage et non une image... Inaugurée en 1997, elle s'intitule Soleil pour Galilée.




Stele "Sole per Galileo Galilei"

à Pise

 



Á Pise aussi, les rives de l'Arno sont propices à l'évovcation de Galilée. La ville a donné son nom à un quai... et par voie de conséquence, à un arrêt d'autobus!
Il s'y est aussi déroulé des expositions en hommage au savant.
 
Mais on trouvera bien mieux... à condition d'explorer avec curiosité les vestiges de vieux remparts qui furent aux portes de la cité -toujours le long de l'Arno. Pas spécialement mise en valeur par une localisation (une relégation?) dans l'angle droit formé par deux murs, près d'une tour guelfe, un peu camouflée  par la végétation pour le passant pressé, c'est une statue du grand savant que l'on découvre ici! C'est le Ponte dellla Cittadella  qu'on aperçoit derrière  (pour vous aider à situer).  Le petit cube de marbre devant le socle  indique  qu'il s'agit de Galilée... mais les autres inscriptions, dont probablement le nom de l'auteur, sont illisibles!!!





et ailleurs!

Á Bologne, surprise en débouchant sur une petite place piétonnisée; Galilée est là, avec son inséparable lunette, bien évidemment!



Œuvre de Gianni Arico, sponsorisée (entre autres) par le Cercle Galiléen de Bologne


Á Kalouga, au Musée de l'Histoire de la Cosmonautique, Galilée nous accueille dans le hall d'entrée, à côté de Képler... avec qui il a entretenu une correspondance; ce voisinage est naturel. Giordano Bruno et Copernic ne sont d'ailleurs pas loin!
On appréciera le style très ... soviétique de ces reliefs. Mais au moins, cela change un peu!

N.B.: la présence de ce musée s'explique par le fait que c'est dans ce bourg qu'est né Tsiokovsky, le génial visionnaire de la conquête de l'epace!


Références


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