T' est définie par
T'oT = ToT'=Id,
et tout cet ensemble de transformations constitue ce que nous
appellerons un
groupe, selon
la définition que nous donnerons un peu plus loin. Ci dessous,
on a visualisé les vecteurs relatifs à
T² en
jaune, et
T' en vert.
Tous ces vecteurs ont pour
composantes ( na, 0 ),
où a est fixe -de
l'ordre de 0,80m sur cet exemple- et n
entier relatif.
Hermann Weyl n'a pas pris pour exemple le palais de Darius à
Persépolis... mais celui de Suse, et sa célèbre
frise des Archers, dont voici un des représentants:
Musée de Téhéran
(Iran)
Pourtant, cette image ne permet pas à elle toute seule de
se faire l'idée exacte de la frise: Weyl attire notre attention
sur une petite subtilité que vous pourrez saisir mieux saisir en
allant la voir au
département
des Antiquités Orientales du
Musée
du
Louvre (Paris), ou
virtuellement
en suivant ce lien :
"Vous devez noter que la translation
de base, a, est égale à deux fois la distance qui
sépare les archers, puisque le costume des
archers change
alternativement"
(H.W.)
Qu'à cela ne tienne! Le
même phénomène est également observable
à Persépolis!
Persépolis
(Iran):
escalier de
l'Apadana
palais des mille colonnes
Sur ces photos, le "motif de base" (le plus petit à partir
duquel on puisse reconstituer toute la frise en appliquant
ad libitum les translations
T et
T') est de deux personnages, en
raison des alternances, respectivement:
- d'un bouclier, d'une lance;
- d'un Mède et d'un Perse (la distinction se
faisant par les coiffes).
En d'autres endroits, il sera raisonnable de considérer que le
motif de base est d'un seul personnage, au nom du principe
géométrique sous-jacent: mêmes personnages (des
Assyriens, reconnaissables à leur coiffe), mêmes gestes.
L'invariance par translation serait parfaite... s'ils avaient les mains
vides; et tout l'effet de la variété des offrandes vise
à souligner la puissance de l'empereur Perse!
Persépolis (Iran):
escalier
de
l'Apadana, frise des tributaires: les Assyriens
Un principe qui s'exprime bien plus tôt dans les
fresques de la civilisation Minoénne
Palais de Minos à Cnossos
(Crète)
Persépolis nous permet même de voir une chose plus rare:
des translations qui ne sont ni verticales, ni horizontales, avec ces
personnages qui "montent les escaliers": translation stricte,
géométrique, mais en contrepartie quelque peu
figée pour les archers; tranlation des motifs essentiels pour
les tributaires, donnant l'impression de translation en première
lecture, mais avec une différentiation ultérieure par les
offrandes (comme pour les Assyriens ci-dessus) et, artistiquement, un
aspect beaucoup plus dynamique obtenu en faisant reposer les peids sur
des marches différentes.
Persépolis (Iran):
Archers, escalier
de
l'Apadana
Tributaires, escalier du Palais de Xersès
Ailleurs,
quelques autres exemples
Colonnades et Cloîtres
Le rythme par la répétition régulière
confère sans nul doute leur harmonie aux colonnades dont la
Grèce antique a fait un large usage -malheureusement, un
état de conservation impeccable est requis pour
l'apprécier pleinement. Et en d'autres lieux et d'autres
temps aussi...
Athènes (Grèce): Stoa d'Attale, au Forum
Moulins à Prière au
monastère de Ghyantze (Tibet)
Et, comme pour les archers de Perse, on peut voir un cas où le
plus petit motif dont on puisse déduire la totalité est
fait de deux colonnes au lieu d'une.
Cyrène
(Lybie): Portique des Hermès,
II-ème siècle
Le sculpteur y a fait alterner les deux divinités protectrices
du gymnase (Ptolémaïon): un Hermès (imberbe) avec un
Héraklès (barbu); l'ensemble original s'étendait
ainsi sur 130m! Hélas, les têtes ont beaucoup souffert, si
bien que cela ne saute plus aux yeux; malgré tout on pourra s'y
retrouver avec la position des bras.
Une autre façon d'adoucir la relative austéritédu
modèle Grec classique a été l'introduction
d'arches. Nous devons à l'évidence aux Grecs et aux
Romains le modèle des galeries marchandes de beaucoup de nos
villes!
Leptis Magna (Lybie): les arcades du
nouveau forum, II-ème siècle
Celle-ci répétait dans les
médaillons la tête de
la gorgonne Méduse -en souvenir de la décoration du
bouclier d'Athéna;
quelques-unes
toutefois étaient légèrement différentes,
rappelant de manière plus suggestive sa chevelure de serpents.
Les cellules monastiques se répètent à
l'identique, indépendamment du culte considéré. La
visite de n'importe quel cloître en France vous en convaincra
sans peine, mais n'oublions pas d'aller voir ailleurs...
Médersa Tillia-Kari à Samarcande
(Ouzbékistan)
Monastère de Samya (Tibet)
Monastère de Tashilumpo
à Shigatze (Tibet) Médersa
Nadir Diwan Beg à Bukhara (Ouzbékistan)
Translation et Décoration
Nous avons découvert dans le cadre de la
symétrie plane les
allées
de sphinx de Louxor, dont chaque côté est fait des
translatés d'un seul animal. On le retrouve dans la
nécropole Thébaine à Karnak, mais le motif de base
est le bélier:
Karnak (Egypte): l'allée de
béliers
Les animaux seront également mis à contribution "en
translation" sur des reliefs:
Bishapur (Iran): tombeaux Sassanides
Mais
la répétition peut encore s'appliquer à un motif
purement géométrique; c'est très fréquent
dans les mosaïques et dallages de sols.
Mosaïque de sol à
Délos (Cyclades)
Comme
dans le cas des allées de sphinx et de béliers, une
symétrie bilatérale a ensuite été
appliquée. L'image complète est toutefois moins riche en
syméties, car le motif de base n'a pas de symétrie
propre, alors que sphinx et béliers en possédaient une.
L'exemple suivant est un mur peint. En premier, nous percevons l'effet
de translation du motif, le Bouddha. Mais, de même que chaque
tributaire en Perse apporte un cadeau différent, ici chacune des
"vignettes" illustre une position différente des mains du
Bouddha (dévolue à un aspect de son enseignement);
à droite de la deuxième, par exemple, la classique "prise
de la terre à témoin".
Monastère de Tashilumpo
à Shigatze (Tibet)
L'effet de répétition, de nombre, vise toujours
à donner l'impression d'une infinie richesse, et à
susciter l'humilité du spectateur; mais là où
les souverains perses soulignaient leur richesse matérielle, les
moines tibétains insistent sur la richesse intellectuelle et
l'immensité de l'enseignement du Bouddha. Dans un cas c'est le
contribuable que l'on impressionne, dans l'autre le disciple!
Et puisqu'il s'agit d'impressionner... pourquoi ne pas penser à
un mur de crânes! Terminons donc sur le continent
Américain, avec la thématique violente des
Aztèques dans leur capitale, ou plus sereine chez les Incas.
Tenochtitlan (ancienne Mexico,
Mexique)
Temple de la Lune à Tihuanaco (Bolivie)