Pauvre d'Alembert! Paris
n'a conservé aucune trace, ni de son lieu de naissance, ni
de sa sépulture:
"D'Alembert fut
exposé quelques heures après sa naissance, le 17
novembre
1717, sur les marches de l'église Saint-Jean-Lerond.
Cette petite
église, démolie en 1748,... avait été
une chapelle dépendant de la cathédrale ou, pour parler plus exactement, le
baptistère même de Notre-Dame de Paris, accolé à
la gauche de la façade"
C'est ainsi que
Joseph
Bertrand commence sa biographie. Enfant naturel (comme on
disait alors) du chevalier Destouches et de Mme de Tencin, il avait
été abandonné sur le perron d'une
église, procédé bien classique...
recueilli et confié à l’hospice des
Enfants Trouvés, il y fut baptisé Jean Le Rond,
en mémoire du lieu où il avait
été découvert
-procédé non
moins classique..
A son décès, le 29 Octobre
1783, l'enterrement à l'église lui fut
refusé -séquelle d'une polémique
contre les jésuites ; l'anonymat de sa
sépulture assura sa disparition ultérieure.
La Mémoire
de Paris...
Malgré cela, Paris se souvient de d'Alembert: on peut y voir
deux statues qui le représentent. La première sur
la
façade de l'Hôtel de Ville:
Précisément,
à l'angle Place de l'Hôtel de Ville - Rue de
Rivoli, Premier étage.
Situation
générale
Un génie des
Lumières... plutôt dans l'ombre!
Deuxième
rencontre au Louvre, département des sculptures
françaises.
L'œuvre,
réalisée
par le sculpteur Félix Lecomte (1737-1817) est une commande
antérieure à 1786. Napoléon en fit don
à
l'Institut. Le respect des lois du genre et de l'époque est
à noter dans les détails:
Eh oui! À
ses pieds, le brouillon du
Discours Préliminaire
à l'Encyclopédie -une vue
"retournée" de 180° en attestera.
Contraste
forcé pour faire ressortir le trait.
Des
portraits en peinture
existent
également en région Parisienne; trois au moins.
L'un est situé dans la salle des
séances de l'Institut (aile Lebas)
-hélas, non ouverte aux visiteurs lors des
Journées du Patrimoine... En voici deux autres (informations
supplémentaires en cliquant sur les miniatures):
|
|
par Catherine Lusurier (1777)
Musée Carnavalet, Paris
|
par Quentin La Tour (1753)
Musée du Louvre, Paris |
Un ouvrage d'A. Gasté (1896),
disponible
en ligne a d'ailleurs été consacré
à ce second portrait.
Et puis, il a une place
dans la gigantesque fresque de Raoul Dufy,
la
Fée Électricité, peinte
en 1937 et exposée en
permanence au Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris: le
premier à étudier l'équation des
ondes, il ne
pouvait que la mériter!
Parmi les
"théoriciens" de l'électricité.
À sa gauche, De Borda.
Le
Mathématicien et l'Encyclopédiste
Mathématicien, ce fut la première vocation de
D'Alembert! C'est dans cette discipline qu'il se signale par un premier
travail à l'Académie des Sciences en 1739: il a
alors 22 ans. Il avait fait préalablement de fort brillantes
études au
collège
janséniste des Quatre-Nations , car son
père, s'il ne l'avait pas
reconnu, avait veillé à lui assurer des
ressources et une bonne éducation. Il y fut inscrit d'abord
sous le nom de Darembert, changé ensuite en D'Alembert.
Le collège
(aujourd'hui
siège de l’Académie
française),
et sa cour avec le cadran solaire double.
Chambres et salles de cours donnaient sur cet espace; ainsi professeurs
et élèves avaient l'heure!
Pour s'en tenir à l'essentiel mathématique d'une
œuvre scientifique importante (incluant Physique et
Astronomie), on signalera:
- l'étude de
l'équation des Cordes Vibrantes, par laquelle
il fonde (1747) la théorie des Équations
aux Dérivées Partielles et se montre
précurseur de l'Analyse Harmonique: la
célèbre controverse avec
Daniel
Bernoulli et
Euler
trouvera sa résolution dans la théorie de
Fourier...
en
1807. Pour plus de détails, notamment une analyse
commentée des principaux textes, c'est
ici,
dans notre page introductive à l'analyse de
Fourier.
Début des
deux premières livraisons, et une page de figure (Liens vers
le texte intégral ci-dessous)
- le théorème
fondamental de l'Algèbre: si la manie
française de dénommer
Théorème
de d'Alembert ce qui ne sera pas complètement
éclairci avant Gauss peut (légitimement!) agacer,
on ne saurait pour autant occulter son rôle ni ses efforts.
Il est l'un des maillons importants de la longue chaîne de
ceux qui, depuis la première formulation de
Descartes
dans la
Géométrie
(1637), "labourent le terrain" dans lequel
Gauss
n'aura
plus qu'à semer en réexaminant les lacunes de ses
prédécesseurs, qu'ils s'appellent
Euler,d'Alembert,
Lagrange
ou
Laplace...
Gauss ne commence-t-il pas son
mémoire en disant:
"On doit la
première démonstration du
théorème à l'illustre
géométre d'Alembert, Recherches sur le Calcul
Intégral, Histoire de l'Académie de
Berlin, Année 1746, pp
182 et suivantes" ?
Les deux
premières pages du mémoire...
et le moment crucial
où apparait le fameux énoncé, dans
toute sa clarté.
-
les articles
mathématiques de l'Encyclopédie:
certes, notre homme s'y montre plus habile compilateur que
véritable novateur; mais il faut aussi à la
science des gens ayant le talent, qui n'est pas
donné à tous, de synthétiser les
connaissances de leur temps. S'il fallait lui faire un reproche, ce
serait plutôt de ne pas citer ses sources! Son article sur
les séries, par exemple ne fait guère que
recopier Euler... Il délégue également
certains sujets à ses collaborateurs; on sait ainsi que
c'est Condorcet qui se chargea de l'article
fractions continues.
Soulignons, pour le porter à son crédit,
le
souci, complètement novateur, d'intégrer les
avancées les plus récentes; ainsi,
en liaison
avec le théorème précédent,
le fabuleux constructeur d'équations mis au point en 1761
par Janos Segner (la rédaction de
l'Encyclopédie
s'étale de 1751 à 1772).
Liens
Biographies
Œuvres
Livres et Revues
- Le numéro 39 des Génies de la Science
(Mai-Juillet 2009): voir le sommaire
en ligne ; conçu par P. Crepel.
- C, ALVAREZ, J. DHOMBRES, Une
Histoire de l'Imaginaire Mathématique: Vers le
Théorème fondamental de l'Algèbre et
sa
Démonstration par Laplace en 1795
(Hermann)
- C, ALVAREZ, J. DHOMBRES, Une
Histoire de l'Invention Mathématique: Les
démonstrations
du Théorème fondamental de
l'Algèbredans le Cadre
de l'Analyse... de Gauss à Liouville. (Hermann)
- C, ALVAREZ, J. DHOMBRES, Une Histoire de ...:
Troisième et dernier volet, à paraître
(Hermann)
- B.FINE, G. ROSENBERGER, The Fundalmental Theorem of
Algebra
(Springer)
- R. REMERT , The
Fundalmental Theorem of Algebra in H.D. EBBINGHAUS
& alias, Numbers
(Springer)
Documents en ligne