Dublin, une Promenade... Hamiltonienne 



 
brouillon réputé de la main de Hamilton
(source: History of Ireland)

Un des plus célèbres Flash des Mathématiques

Le lieu est bien connu des mathématiciens, en tout cas "de réputation", et, à l'heure de Wikipedia, par la photo de la plaque commémorative (qui circule abondamment sur la toile); celle du Mathouriste ne peut évidemment guère en différer. Mais une flânerie mathématique est tout de même en mesure de vous en révéler un peu plus -à commencer par ce vieux pont lui-même-, par un cadrage plus large sur le chemin de promenade du savant... et par une petite surprise récente, qu'il vous garde pour la fin.



Broom Bridge (Brougham Bridge selon Hamilton)...
... et sa plaque-souvenir
 
Si l'évènement est connu avec précision, c'est qu'on en doit la relation à William Rowan Hamilton (1805-1865) lui-même, par une lettre à son fils Archibald datée du 05/08/1865 -moins d'un mois avant son décès. Il revient sur les circonstances de sa découverte, sans esquiver le substrat: depuis quelque temps, il ruminait le problème de la multiplication des vecteurs de l'espace usuel à trois dimensions, c'est à dire des triplets (x,y,z).
Pour le cas de la dimension 2, la résolution de la question était alors bien connue, grâce à la théorie des nombres complexes:


En bref pour comprendre le contexte
 (mais vous pouvez sauter et revenir après la promenade...)


Toute la "magie" des nombres complexes, ou imaginaires, réside dans l'invention d'une racine carrée au nombre -1. Chez les nombres ordinaires, un carré est toujours positif, -1 ne peut donc en être un.
-1 n'a pas de racine carrée? Qu'à cela ne tienne, on va lui en inventer une. Comme c'est le fruit de notre imagination, on va l'appeler i, ce sera un nombre imaginaire, vérifiant la relation (oui, la première qui est écrite sur la plaque)
i² = -1
Alors, on sait calculer, par les règles algébriques habituelles, le produit de deux nombres dits complexes
(a + ib) × (x + iy) = (ax - by) + i (ay +bx)
ce qui peut être vu comme produit du vecteur (a , b) par le vecteur (x , y)


 Et tout naturellement, il essayait de s'en inspirer, de la copier, de l'adapter, de la tordre un peu au besoin -et on verra qu'il devra. Revenons à sa lettre en quelques extraits; la numérotation des paragraphes y a son importance, comme le révèlera le trait d'humour final:

" (3) [...]  S'il m'est permis de parler de moi et de ma connexion au sujet, je peux le faire en t'impliquant, en revenant à une époque pré-quaternionique, où tu étais encore un enfant, mais un enfant qui avait appris de moi ce qu'est un Vecteur, représenté par un Triplet, et je suis capable de mettre le doigt de ma mémoire sur l'année et le mois -Octobre 1843 [...]  Chaque matin de la première quinzaine  du mois en question, vous -toi et ton petit frère William Edwin, me posiez la question: «Eh bien, Papa, as tu réussi à multiplier les triplets?» À quoi il  me fallait toujours répondre, en hochant tristement la tête:  «Non , je ne sais que les additionner et les soustraire

Lettre à son fils Archibald, 05/08/1865)

S'inspirer, c'est introduire un nouvel élément j tel que j² = -1 (deuxième formule de la plaque, on s'approche...), pour "rejouer la même combinaison dans un autre plan", celui des (x , z) vus comme des x + jz ,en quelque sorte ; fort bien, mais quand on passe au produit des triplets:
(a + ib +jc) × (x + iy +jz)
que faire des produits qui vont apparaître, i j et j i ? Quelle valeur leur donner?  C'est toute la question qui obsède Hamilton, avec un blocage aggravé par la supposition implicite, parce qu'habituelle dans tous les nombres manipulés jusque là, complexes y compris, que i j = j ...
"(4) [...] Mais le 16 de ce même mois -qui tombait un lundi, jour de réunion du conseil de la Royal Irish Academy que je devais présider, je marchais le long du Canal Royal, aux côtés de ta mère, qui peut-être m'y avait condui,; et, quoiqu'elle me parlât de temps à autre, un courant sous-terrain parcourait mes pensées, qui finit par me donner un résultat, dont il n'est pas excessif de dire que j'entrevis instantanément l'importance future. Ce fut comme si un circuit électrique se refermait, qu'une étincelle jaillissait, annonçant (je m'en rendis compte immédiatement) de nombreuses années de travail dans cette direction [...], si seulement il m'était permis de vivre assez longtemps pour en communiquer la découverte. Et je ne pus résister à l'impulsion -aussi indigne d'un philosophe fût-elle- de graver avec mon couteau, sur une pierre de Brougham Bridge, alors que nous y passions, la formule fondamentale liant les symboles i, j, k, à savoir
i² = j² = k² = ijk = -1
qui renferme la Solution du Problème, mais qui, bien sûr, comme inscription, a depuis longtemps été effacée par les années. Mais une trace plus durable en demeure dans les actes du Conseil pour ce jour, qui ernregistrent le fait que je demandai et obtins de faire à la première réunion pleinière de la session, une communication sur les Quaternions; elle eut lieu, conformément  à ce calendrier, le Lundi 13 Novembre suivant.

Avec ce
quaternion de paragraphes prend fin cette lettre; j'espère la faire suivre très rapidement d'une autre.
 
Ton père affectueux,
William Rowan Hamilton



Mine de rien, on vient par cet exemple de tordre le cou à l'idée aussi fausse que répandue de l'éclair de génie qui vous frappe par miracle, avec deux caractéristiques de tous ces éclairs de génie que nous admirons, de Newton à Poincaré:
  1. Une longue gestation les précède, et elle comporte souvent des phases (très) douloureuses;
  2. Le découvreur est plus souvent ingénieur que génie: il ne part pas de rien, mais de ce qui marche déjà; il essaie d'adapter, d'améliorer, il bricole, il rate, il bloque... jusqu'à un point de rupture où il va introduire du nouveau, acculé par la contrainte, les contradictions rencontrées. Ce que l'on appelle parfois le principe du rasoir d'Ockham. 
Hamilton n'a donc rien d'un Géo Trouvetout (vous savez, celui qui se lève chaque matin en se demandant ce qu'il va bien inventer aujourd'hui); on a plutôt envie de le comparer à ses compatriotes rugbymen: il est tenace, ne lâche pas, se fait bloquer à qiuelques mètres du but (la "Terre promise", comme disent les adeptes de ce sport), mais à force de bloquer, d'enfoncer, de rebloquer, de relancer, on va "faire le trou" et marquer, c'est sûr! L'étincelle comme concrétisation du fameux Fighting Spirit.

Nous y reviendrons... mais n'oublions pas que nous sommes partis pour une promenade!

Rejoignons le canal

Si l'on regarde un plan actuel de Dublin, on remarque que l'eau y dessine un Ψ couché -une fourche, si l'on préfère- dont la dent centrale est la rivière qui traverse  la ville d'Est en Ouest, la Liffey, et dont les ceux autres sont des canaux qui la relient au grand fleuve de l'île, le Shannon: au Sud, le Grand Canal, et au Nord, le Royal Canal. C'est ce dernier qui nous intéresse, puisque c'est avec un de ses ponts que nous avons rendez-vous.




plan actuel
plan de 1837

Le plan de 1837 est contemporain de Hamilton, très précisément 6 ans avant la fameuse promenade, ce qui donne une idée assez exacte de la configuration à son époque: les deux canaux enserrent la ville, mais sont légèrement en dehors de celle-ci... Ils seront rattrapés par l'expension urbaine.

Il est facile de rejoindre à sa guise le
Royal Canal: d'où qu'on parte, faire chemin plein Nord, on finira bien par le rencontrer! Mais pour agrémenter le parcours, ous vous suggérons de démarrer à Trinity College (site officiel), où notre héros passa quelques années d'étude (1823-1827), avant d'y devenir un jeune professeur.







Derrière son porche d'entrée un rien austère, c'est un jardin verdoyant que l'on découvre à Trinity College, bordé de bâtiments au style néo classique... ou so british!

On y voit notamment la statue de George Salmon (1819-1904), mathématicien, spécialiste de Géométrie Algébrique, qui en fut aussi le doyen (provost est le titre officiel), et qui y côtoya Hamilton.


Mais ne négligez pas non plus d'admirer l'œuvre d'Henry Moore, 'Reclining Connected Forms' (1969).


Hamilton y devint professeur d'astronomie, après avoir été nommé en 1827 au poste d'astronome royal à l'observatoire de Dunsink (légèrement à l'ouest de Dublin), battant six candidats dont George Biddell Airy, qui obtint celui de Cambridge en 1828, puis  Greenwich en 1835. Objectivement, le choix d'Hamilton n'avait rien d'excellent: c'était un piètre observateur (contrairement à Airy), et le sujet était loin de le passionner. Disons qu'en lui assurant un revenu, cela lui permit de se consacrer aux mathématiques....




l'itinéraire que nous vous suggérons,
en jaune!

Mais il est temps d'entamer notre marche.

Traversons la Liffey par O'Connell Bridge, poursuivons par la grande artère O'Connell Street, puis dans son alignement par Cavendish Row, jusqu'à rencontrer Dorset Street, que l'on prendra sur la droite
sur la droite, jusqu'à ce qu'on franchisse le canal; il n'y aura plus alors qu'à tourner à gauche et longer le canal jusqu'à notre but.

Quel intérêt à cet itinéraire plutôt qu'un autre? Une simple question d'ambiance... irlandaise, puisque nous passerons ainsi devant le pub The Auld Triangle, à l'angle de Gardiner Street.

Or, The Auld Triangle, c'est aussi une chanson très populaire là-bas, et dont les lyrics insistent beaucoup sur le Royal Canal: ce n'est certes pas le sujet principal de la chanson -une sorte de blues d'un prisonnier, mais ce sont les deux vers de refrain que le public est invité à reprendre en chœur:

And the auld triangle went jingle-jangle
All along the banks of the Royal Cana
l

Nous vous suggérons de l'écouter avec cette vidéo de Greg Hansard, Irlandais pur jus, devant la foule de... Chicago.

 

On prend la route (
Royal Canal Way) qui longe le canal; rien de très remarquable, mais bientôt, après le Cross Guns Bridge au nord de Phibsborough, elle se verra substituer un simple chemin de halage, qu'on va emprunter en restant du même côté de l'eau. (On coupe donc à angle droit la large route qui passe sur le pont.)

Difficile de se tromper, mais si vous avez un doute, voici un repère aussi commode que sympathique aux amateurs (sans modération) de rugby et (avec un peu plus de prudence) d'autres spécialités du pays...


 

All Along the Banks of the Royal Canal...

Nous y voilà donc. Là se trouve l'écluse dite "de l'entrée à Dublin" (si l'on parcourt le canal dans l'autre sens, venant de l'ouest). Même aujourd'hui, avec une agglomération plus étendue, on a vraiment l'impression de quitter la ville, d'entrer dans la campagne environnante. vb





Au delà de l'écluse, en amont, l'eau est si calme que, même par un ciel gris, le miroir deau est parfait. Les bâtiments s'espacent, l'ambiance est de plus en plus campagnarde...






Ah! Enfin un pont... Non, celui-ci est pour la voie ferrée.
Encore un peu de patience, encore une écluse...



Et voici un vieux pont de pierre. Un peu bizarre, non?
Deux arches qui ne sont pas un même style (celle de gauche, plus large, est en "anse de panier), une passerelle moderne à la perpendiculaire, voilà qui manque singulièrement de style! Comme si le vieux pont du temps d'Hamilton (au fait, avaitil une ou deux arches? Nous n'en savons rien) avait été élargi, ou s'était fait rajouter une arche, puis la passerelle.

Et par là, aucune trace de la fameuse plaque!
Il n'est pas difficile de comprendre les raisons de ce bricolage archtectural: l'arche large doit être suffisante pour enjamber une voie ferrée à double sens de circulation, et Broombridge est une halte, d'où l'installation de la rampe perpendiculaire au pont, pour donner un accès au quai.








Le panneau vous confirmera (en  Anglais et en Gaëlique) que vous êtes bien à l'endroit souhaité; parallèlement à la gare se trouve aussi le terminus d'une ligne de tramway qui mène au centre-ville. Vous avez donc le choix si vous souhaiter venir rapidement, mais cela aura moins de charme.

On se trouve ici dans le quartier périphérique de Cabra.
Il ne nous reste plus qu'à inspecter l'autre côté du pont pour chercher notre plaque, et bien sûr, elle est là, bien en évidence.

À côté de la Plaque


Brassens vous le chante (source: INA)
au premier plan, la main de Pierre Nicolas
L'ami Georges vous le dira mieux que le Mathouriste ne saurait le faire:

Il suffit de passer le pont    
C'est tout de suite l'aventure


Aventure, il y a bien pour Hamilton: il va falloir abandonner la commutativité de la multiplication, si naturelle, pour entrer dans un monde moins confortable et encore, pour beaucoup, à découvrir!
 

Et voilà! De l'autre côté, on voit non seulement la plaque bien connue, mais aussi le tout récent médaillon portraiturant le héros (2021), commandé par la société historique de Cabra. On pourra aussi remarquer que les pierres n'ont pas la même taille, ce qui confirme une modification, certainement effectuée pour le passage de la voie ferrée.





Il est temps d'en dire plus sur deux sujets: l'histoire de  la plaque rectangulaire et les formules de Hamilton qui y sont inscrites (Au début de notre page, nous n'avons qu'esquissé le contexte de cette découverte, afin de ne pas décourager ceux qui cherchent dans ce site autre chose que des formules. Et interrompu la lecture à i² = j² -1, laissant un Hamilton perplexe devant la multiplication des triplets...)

1. Cette plaque a été inaugurée en 1958, et pas par n'importe qui: celui qui était alors taoiseach (premier ministre) de l'Irlande, et en deviendraait le troisième président l'année suivante: Éamon de Valera, Une place politique gagnée durement, car il avait été auparavant  un des  chefs de l'insurrection de Pâques 1916, de la guerre d'indépendance (1919-1921), puis incarcéré de 1923 à 1924 en raison de son opposition à la partition qui est toujours en vigueur aujourd'hui.

Mais avant d'être un homme de la lutte armée, il avait été rugbyman, et... professeur de mathématiques. Et dans sa prison, il avait gravé au mur les formules de Hamilton! Aussi tenait-il particulièrement à inaugurer cet hommage au "libérateur des Mathématiques" (celui qui avait su s'affranchir de la commutativité dans le produit des nombres). Voici un extrait de son discours:


"Je suis heureux, en tant que Chef du Gouvernement, de pouvoir honorer la mémoire d'un grand scientifique et d'un grand Irlandais. C'est pour moi une grande satisfaction d'être présent aujourd'hui, car il y a plus de 50 ans que j'ai appris l'histoire du pont et de la découverte des quaternions. Arthur Conway était professeur de physique mathématique à l'UCD, et c'est lui qui m'a initié au travail de Hamilton et raconté l'histoire du pont, comment la solution lui était apparue alors qu'il passait par là, et avec quelle inspiration Archimédienne il avait exprimé son Euréka en gravant l'immortelle formule sur le pont. En plusieurs circonstances, ensuite, je suis venu à cet endroit comme on se rend sur un lieu saint. J'ai cherché, pierre après pierre, dans l'espoir de retrouver quelque trace de cette fameuse inspiration. Je ne savais pas, jusqu'à une époque relativement récente, que Hamilton lui-même avait cherché son inscription une quinzaine d'années après sans réussir à la retrouver. Le temps avait fait son ouvrage, mais nous voici réunis au pont pour en perpétuer le souvenir, afin que ceux qui passent ici se remémorent un endroit aussi célèbre dans l'histoire des sciences."


2.
Maintenant, pour ceux qui sont curieux de la fin de l'histoire mathématique,il nous reste à décrypter le reste de l'inscription. Qui est k? Comment vient l'idée d'abandonner la commutativité? Et comment l'échec sur les triplets mène-t-il aux quadruplets? Nous avons la chance que le découvreur nous raconte par le menu son itinéraire, et c'est plutôt rare!


Plus de détails sur la genèse de ces formules, par Hamilton in person
 (Vous n'êtes pas obligés de lire; néanmoins, ne partez pas trop vite:
après ce cadre, d'autres images et une deuxième promenade de Hamilton vous attendent!...)


"Mon cher Graves,

C'est un très curieux enchaînement de spéculations mathématiques que jai vécu hier, et je ne peux quespérer qu'il vous intéressera. Vous savez que j'ai longtemps souhaité disposer d'une théorie des Triplets, analogue à celle des Couples que j'ai déjà publiée, et je crois que vous avez exprimé le même désir [...]. Je pense maintenant que j'ai découvert hier une théorie des quaternions qui englobe
une telle théorie des Triplets.
 Voici comment se sont ordonnées mes pensées. Comme la
racine carrée de -1 est, en un sens bien connu, une ligne perpendiculaire à celle de 1, il semblait naturel qu'une certaine autre quantité imaginaire déterminerait une ligne perpendiculaire à la précédente, [...]tout en étant aussi une racine carrée de -1, à ne cependant pas confondre avec la précédente. Appelant l'ancienne i , selon l'habitude des Allemands, et la nouvelle j, je cherchais quelles lois devaient régir le produit de (a + ib + jc) par (x + iy + jz) Il semblait naturel de supposer  que ce soit
(ax - by - cz) + i (ay + bx) + j (az +cx) + i j (bz + cy)
  mais que faire de i j? Doit-il être de la forme (a + ib + jc)? Son carré semblerait valoir 1, puisque i² = j² = -1; et cela pourrait nous inciter à poser
ij = 1 ou  ij = -1;
 mais aucune de ces suppositions ne nous permettrait d'avoir la somme des carrés des coefficients de  1 i j égale au produit des sommes des carrés  correspondants  dans les facteurs. Prenez le cas le plus simple du produit, lorsqu'il s'agit du carré, on aura
- - + 2 i ab + 2 j ac + 2 i j bc , et comme
(- - + (2ab + (2ac = (+ +
la condition sur les modules est remplie, si l'on supprime le terme en i j [...]
Voyez, je fus un instant tenté d'imaginer que ij = 0. Mais cela semblait singulier et malcommode, et je me rendis compte que la suppression du terme de trop [en français dans le texte] pouvait être effectuée avec une supposition qui me semblait moins dure, à savoir  j i  = - i j . Je posai donc ij = k , ji = -k , sans me soucier de savoir si k = 0 ou non.  Reprenant alors le produit de deux triplets quelconques,  (a + ib + jc) par (x + iy + jz), et cherchons si la loi des modules est satisfaite quand nous supprimons le terme en k. Est-ce que
(+ + (+ y² + )² = (ax - by - cz + (ay + bx)² + (az + cx?

Non, le premier membre excède le second de
(bz - cx. Mais c'est exactement le carré du coefficient de k dans le développement du produit
(a + ib + jc).(x + iy + jz)
si l'on tient pour acquis ij = k , ji = - k ,comme proposé ci-dessus. Et là, je vis poindre l'idée qu'il nous faut admettre, en un certain sens, une quatrième dimension de l'espace, afin de pouvoir calculer sur les triplets; ou, en transférant ce paradoxe en algèbre, admettre un troisième symbole imaginaire k, qu'il ne faut confondre ni avec i, ni avec j, mais qui est le produit du premier par le second, et qu'il faut donc introduire des quaternions a + ib + jc+ kd
Je vis qu'on avait probablement ik = - j , parce que ik = i ij et i² = -1; et que de même on pouvait s'attendre à ce que kj = i jj = - i ; d'où j'ai pensé qu'il était probable que k i  = j , jk = i car il semblait vraisemblable qu'à côté de  ij = - ji , on ait aussi kj = - jk et  ik = - ki. Et parce que lordre de  multiplication de ces imaginaires n'est pas indifférent, nous ne pouvons pas en déduire que ij ij = 1, en disant que  i²j ²= (-1).(-1) = +1 . Il est préférable de  voir que
i ji j = - ii jj = -1

[...] Mon système de relations était alors complet
i² = j² = k² = -1;
ij = - ji =  kjk = - kj =  i ki = - ik =  j ,
et avec cela j'étais contraint à considérer que le produit de deux quadruplets est un quadruplet. [...]"

Lettre au Professeur P.G. Graves, 17/10/1843 (extrait)
L'intégralité (en V.O.)  en suivant ce lien

 
vb


Un sculpteur sur sable, Daniel Doyle, a réalisé une très belle restitution de la scène, peut-être même plus belle que la vérité... Lady Hamilton était probablement plus distante. D'autant que William n'avait pas pu épouser son amour de jeunesse et s'était marié par convenance sociale de l'époque; il s'était montré un bon père, certes, mais le lien amoureux n'avait peut-être pas l'intensité suggérée par l'artiste...

Ah, les difficiles amours des héros romantiques (d'ailleurs, on notera que Hamilton s'était essayé à la poésie!): les Quaternions furent-ils pour lui un exutoire comme la Symphonie Fantastique pour Berlioz?
Concernant la poésie, il n'avait pas hésité à formuler la comparaison:
Mathematics is an aesthetic creation, akin to poetry, with its own
mysteries and moments of profound revelation.

En tout cas, observez les arches du pont: pas de rapiéçage comme on a pu le voir en réalité actuelle!
(Le sculpteur a-t-il pu s'aider de gravures d'époque? Il serait intéressant de le savoir...)
source de l'image: site d'Anne Van Weerden, consacré à Hamilton.

La Marche Commémorative: Hamilton Walk (since 1990)

Le n'est bien sûr pas le seul à avoir eu l'envie de faire à pied le pélerinage vers Broom Bridge en longeant le Royal Canal. En 1990, le mathématicien Irlandais Anthony G. O’Farrell a organisé une marche commémorative au jour anniversaire de la découverte; et ce premier essai a été transformé en un évènement  annuel qui attire de plus en plus de monde: entre 200 et 300 personnes y participent depuis l'an 2000, et il y a du beau monde: des prix Nobel de Physique (Murray Gell-Mann en 2002, Steven Weinberg en 2005, Frank Wilczek en 2007), des médailles Fields de Mathématiques (Andrew Wiles en 2003,Timothy Gowers en 2004, Efim Zelmanov en 2009).Le départ est donné depuis l'Observatoire de Dunsink, où résidait et travaillait Hamilton, avec un discours introductif sur Hamilton et son œuvre, par un prestigieux participant (Ingrid Daubechies en 2006, par exemple).

source de l'image: Dunsink Observatory (DIAS)

Puis un trajet en train (l'observatoire est à 8 km à l'est de Dublin) conduit les participants à une gare près du Royal Canal, où commence la marche sur le chemin de halage, c'est à dire l'itinéraire que nous venons de vous faire découvrir. Organisateur depuis 2010, Fiacre O' Cairbre a eu l'excellente idée d'écrire un article de souvenirs sur cette marche, que nous vous recommandons chaleureusement. Nous lui empruntons quelques images qui l'illustrent en espérant que cela vous incitera à le lire:



Fiacre O' Cairbre, Andrew Wiles et Anthony G. O’Farrell
Marche 2003
Anthony G. O’Farrell, discours à Broombridge,
Marche 2005

Coda pour Broombridge

Concluons cette première promenade comme nous l'avons commencée, en chanson folk... (N'est elle pas -fût-ce involontairement- aussi évocatrice de l'état mental du héros à ce moment précis que... de l'état de l'eau?)

" Like a bridge over troubled water  I will ease your mind  "               



(capture d'écran de ce concert,
mais on peut préférer l'immortel concert de Central Park...)

Mais ô surprise! Il y a une chanson encore plus... hamiltonienne (un peu moins célèbre, reconnaissons le...); elle a été composéee par Jack Gannon, à l'occasion de la marche 2003.

source:l' article de Fiacre ´O Cairbre

Une autre Promenade Hamiltonnienne...



exemplaire original du jeu icosien (seuls 3 existent encore dans le monde entier!)
source: The Puzzle Museum

Références

Biographiques

Écrits de Hamilton

Études,  Contexte Mathématique




 





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