Liouville est venu comme élève au Collège Saint Louis, pour préparer l'École Polytechnique, et il a réussi le concours en 1825. Il en sortira n°8 en 1827, avec pour choix d'école d'application, celle des Ponts & Chaussées -le même choix que Cauchy. Tout ceci est consigné sur la fiche de scolarité ci-contre. |
Il y a suivi les cours d'Ampère et Arago, |
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Deux vues de la cour de l'École, aujourd'hui et hier (gravure) ... |
N'oublions pas qu'Ampère y enseignait les mathématiques! (calcul différentiel et intégral) |
Paris,
rue des Saints Pères. Ceux qui, plus tard, mettront de l'ordre en
France pourraient d'abord balayer le trottoir devant leur porte... |
Le
site historique de la première Centrale est bien connu des touristes...
s'ils lisent la plaque à l'entrée du Musée Picasso! (Hôtel Salé, Paris)
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En 1835, la maladie d'un examinateur de l'École Polytechnique, Reynaud, lui offre l'opportunité de postuler à son remplacement, avec succès. La même année, le décès de Navier, libère une place de professeur sur laquelle il fonde d'autant plus d'espoirs qu'il a fait le remplacement temporaire du défunt. Liouville, Duhamel et... Auguste Comte (qui deviendra plus célèbre comme philosophe) sont sur les rangs.Le Conseil d'Instruction de l'École place Liouville en tête, devant Duhamel; mais l'Académie des Sciences, qui a son mot à dire, met les deux candidats ex-aequo. Après quoi, la décision ultime revient au Ministère de la Guerre (puisque l'École est sous sa tiutelle), et il arrête son choix sur Duhamel. |
candidature à la place de Reynaud (archives de l'X) |
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Partie remise, donc, mais pas pour longtemps: il est élu professeur d'analyse et de mécanique en Octobre 1838, juste à temps pour démarrer le cours de seconde année. Il persuade le Conseil de lui adjoindre son ami Sturm comme répétiteur... et voilà la dream team Sturm-Liouville en place! ci-contre: notes du cours de Sturm oprises par un poluytechnicien... qui n'a pas hésité à caricaturer le prof !. |
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le cours d'analyse (notes manuscrites reliées) |
notes d'un élève. Ici, Liouville introduit la fonction Gamma! |
le "cahier de textes" (!) de la progression du cours |
Le Collège de France (Paris) | annonce de cours du tandem Biot & Liouville |
Biot (Hôtel de Ville, Paris) |
Lettre de candidature. NB: source des documents "tamponnés":
Collège de France.
Le Mathouriste lui adresse ses remerciements pour l'autorisation de les photographier et de vous les présenter.
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En Mai 1843, le décès de Sylvestre Lacroix ouvre un poste en Mathématiques, et Liouville fait acte de candidature. Libri et Cauchy (devant lequel, comme on le voit ci-contre, il serait prêt à s'incliner). Le nouveau titulaire sera élu, à la majorité absolue, par ses pairs. Libri mène au premier tour, mais Liouville prend l'avantage au second... las, une voix pour Cauchy le prive de la majorité absolue requise, et au troisième tour, c'est Libri qui l'emporte!
Liouville, profondément humilié (sic) démissionne de sa fonction -ou tout au moins veut le faire; on lira ci-dessous sa lettre et la réponse "de Normand" de l'Administrateur du Collège... De fait, il cessera son enseignement, mais il y reviendra triomphalement plus tard. |
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Mais en 1850, l'occasion d'une éclatante revanche se présente! Libri, qui avait accédé aux plus hauts postes, avait été nommé, avec la confiance du premier ministre Guizot, secrétaire de la Commission du Catalogue général des manuscrits des bibliothèques publiques de France. Qu'il fût un bibliophile passionné semblait garantir la plus grande qualification pour ce poste... hélas, sa passion n'avait pas de limite, et il abusa gravement de sa position... pour voler des livres et manuscrits précieux! Loin d'être un petit délinquant, il se comporta en voleur de grande envergure (détails ici). Pricvé de ses appuis et démasqué sous la Seconde République, il s'enfuit en Angleterre (avec une bonne part de son butin!), laissant libres ses sièges à L'Académie et au Collège de France. Cette fois, Liouville fut élu professeur au Collège, et le décret signé par celui qui allait devenir le nouvel empereur. |
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extrait (haut et bas) de l'affiche des cours 1862-63 (affiche complète) |
Liouville y donnera un
enseignement annuel jusqu'à la limite des ses forces, à quelques mois
de son décès. Il inaugure la série avec de la géométrie
différentielle ainsi qu'un cours sur les fonctions
doublement périodiques (ou fonctions elliptiques) auxquels
assisteront deux jeunes étudiants, Briot et Bouquet, qui rédigeront
plus tard un traité sur le sujet....
Les questions abordées sont très variées (liste dactylographiée complète, Archives du Collège de France) mais il a ses sujets de prédilection: La Théorie des Nombres (11 semestres, exemple sur l'affiche 1857-58) -de plus en plus présente avec l'avancée en âge, Diverses Questions d'Analyse (15 semestres! exemple sur l'affiche 1862-63). Ce dernier titre a l'avantage d'être assez fourre-tout pour que le menu soit, comme on aime dire de nos jours dans les restaurants gastronomiques... selon l'humeur du chef! Le niveau varie aussi, et il a tendance à décroître en fonction du temps... Gösta Mittag-Leffler aura l'occasion de le mentionner à un de ses correspondants:
Ses cours en Sorbonne (à al
Faculté des Sciences) et ayu Collège lui prennent le plus clair de son
temps, et il se plaint à plusieurs reprises de ne plus pouvoir se
consacrer suffisamment à la recherche.
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Dans les dernières années, sa santé décline, et il lui devient de plus en plus difficile d'assurer son cours. Ainsi, il doit se faire remplacer, pour l'année scolaire 1879-80, par Ossian Bonnet. Ce dernier sera aussi son successeur au Bureau des Longitudes. Et la situation ne s'arrange vraiment pas l'année scolaire suivante. Habitué à souffrir, Liouville a fait face autant qu'il a pu pour honorer ses engagements d'enseignants... s'il fait la demande d'un congé, c'est que, vraiment, il n'en peut plus! |
arrêté de remplacement par Bonnet (archives du Collège de France) |
buste d'Ossian Bonnet à l'X, sculpté par Désiré Fosse |
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demande de Liouville, 1881 |
réponse officielle |
Collègue et ami de François Arago, Liouville partage ses vues politiques: dès 1840, il s'affiche républicain et partisan su suffrage universel (masculin, à l'époque). À cette époque, la Monarchie de Juillet, d'abord libérale, se raidit considérablement et les réunions politiques sont fréquemment interdites. Pour contourner cette censure, l'opposition organise des banquets réformistes. On y réunit de plus en plus de convives, on y porte des toasts à des idées de plus en plus novatrices, et, originalité qui mérite d'être signalée, ils ne se déroulent pas qu'à Paris! On en tient dans toutes les grandes villes de province, suivant l'exemple d'Arago dans les Pyrénées Orientales. À l'image de son ami, Liouville accepte d'en présider un à Toul le 4 Octobre 1840. Ils s'intensifient en 1847-1848, et contribuent de façon notable à la Révolution. Le Gouvernement Provisoire qui en est issu, présidé par Arago, fonde la Deuxième République, et convoque une Assemblée Constituante pour préparer sa Constitution. Liouville se porte candidat à Toul, où il est élu. (source des documents: BnF) |
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Où Liouville se présente comme un républicain "canal historique", mais un républicain modéré. |
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un dessin en 3D pour mieux comprendre le plan (source: cette page Wilkipedia) |
plan des sièges; la place de Liouville est repérée très discrètement (état du document fourni, sans surcharge électronique) |
pour vous aider à repérer l'endroit sur le plan d'origine. Il est voisin de Ledru-Rollin |
"J'ai
trouvé Mad. Dirichlet assez souffrante à mon arrivée, les fatigues du
déménagement et un refroidissement gagné plus tard ayant fortement agi
sur ses nerfs [...] Elle se joint à moi poiir vous remercier des nombreuses commissions que vous avez bien voulu faire pour elle. Toul ce que j'ai apporté fait sensation ici et personne ne veut m'écouter lorsque je réclame une part, bien modeste sans doute, dans le choix des robes pour moi.."
Dirichlet à Mme Liouville, 25/04/1856
"Oui,
Madame, après tant de services que vous avez daigné me rendre, j'ose
vous en demander un nouveau qui aurait pour moi plus de prix encore que
l'emplette de la fameuse robe qui fait toujours l'admiration de la société de Goettingue."
Dirichlet à Mme Liouville, 12/12/1856 | |
La charmante madame Dirichlet...
n'est autre que la sœur de deux musiciens célèbres: Felix et Fanny
Mendelssohn. Elle est ici dessinée par Wilhelm Hensel, le mari de Fanny... dont le petit-fils est le mathématicien Kurt Hensel, père des nombres p-addiques. Quelle famille! |
"Je me dirigerai probablement vers la Bavière rhénane, le Palatinat, pays renommé pour la cure de raisins
qui doit commencer cette année vers le premier septembre, si l'on
peut s'en rapporter aux annonces dans les journaux. Gomme je me
trouverai là sur la frontière de France,à 5 ou 6 heures de Toul, je
n'ai pas besoin de vous dire si je suis tenté de faire une apparition
dans la ville antique que vous appelez la capitale de la Lorraine. Je
crois pourtant que j'aurai la force morale nécessaire pour m'abstenir
et pour ne pas pécher de nouveau contre une loi qui doit être sacrée à
nous autres surtout viri arithmetici comme nous appelait Jacobi, je veux dire la loi de réciprocité. A propos d'arithmétique [...] "
Dirichlet à Mme Liouville, 12/12/1856 |
"J'ai dû changer d'adresse,
la maison que j'occupais rue de la Sorbonne va être démolie. Me voici
au 13, rue de Condé, fort mal installé, mes livres en désordre, ce qui
est fort mauvais pour le travail. Ajoutez à tout cela que pendant ce
déménagement, j'ai marié la plus âgée de mes filles, et vous comprendrez pourquoi il m'a fallu négiger les x et les y."
Liouville à Dirichlet, 10/05/1853
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La rue de Condé (Paris). où Liouville s' installe en 1853... |
... au n°13 |
"Depuis quelques années sa santé était fort altérée. La goutte l'affaiblissait, le chagrin l'accabla. M.
Liouville eut le malheur des gens qui vivent longtemps il survécut à
ceux qui étaient le soutien et la consolation de sa vieillesse. La
perte inattendue de sa femme et de son fils lui porta le dernier coup.
Dès ce moment, malgré les soins d'une famille nombreuse et dévouée, il
ne fit que languir; ce n'était plus que l'ombre de lui-même;
cette année il ne put même achever son cours. Pour qui le connaissait, il n'y avait plus d'illusion à se faire sur la gravité de son état."
E. Laboulaye (Adminstrateur du Collège de France), Discours aux Obsèques de Liouville
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"Depuis quelque temps, battu en brèche par les infirmités de l'âge, et surtout par des deuils de famille bien cruels,[...] M. Liouville s'était affaissé corporellement; cependant sa haute intelligence était restée intacte. Jusqu'au bout il a travaillé: il assistait encore mercredi dernier à la séance du Bureau des'Longitudes, dont il suivait les travaux avec le plus grand intérêt. Mais déjà il nous semblait aspirer àla délivrance. Cette heure est venue pour lui, subitement, le surlendemain."
H. Faye (Président de l'Académie des Sciences), Discours aux Obsèques de Liouville
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L'Académie des Sciences ajourne sa séance prévue ce même jour, et les Comptes Rendus, tome 95
reproduiront l'intégralité des discours prononcés(p.468 & suiv.) au
Cimetière Montparnasse, où il repose désormais. (Vous trouverez les
deux discours sous ce lien).
Énoncer les mérites du défunt est certes la loi du genre, mais il est
on ne peut plus juste de souligner son engagement européen, tant par
ses nombreux contacts et participations aux Asadémies étrangères) que
le rayonnement de son journal.
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Sépulture de Liouville au Cimetière Montparnasse (Division 13, ligne 5 Nord, n°20 Ouest), à Paris |