Blaise PASCAL ou la Vie
Brève
Nous rassemblons ici quelques images et souvenirs sur la vie de Blaise
Pascal (1623-1662).
Pour plus de détails sur son activité de
mathématicien, voir la page Pascal
Mathématicien, et pour son activité de
physicien, la page Le Quatuor
de la Sorbonne.
Clermont-Ferrand... une double (ou triple)
malédiction?
Au registre des actes de baptêmes de la paroisse de
Saint-Pierre de la ville de Clermont-Ferrand est inscrit, selon
l'orthgraphe de l'époque
"Le 27è
jour de juin 1623, a esté baptisé Blaize PASCHAL,
fils
à noble Estienne Paschal, conseiller eslu pour le Roy en
l'élection d'Auvergne, à Clairmont; et
à noble
damoizelle Anthoinette Begon le parrin noble Blaize Paschal, conseiller
du roy en la séneschaussée et siège
présidial d'Auvergne, audit Clairmont; la marrine
dame Anthoinette de Fontfreyde.
Au registre ont
signé PASCHAL et FONTFREYDE."
L'orthographe PASCHAL
subsistera bien plus tard; on la retrouve sous la plume de Fourier
en 1789.
Une première mésaventure
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Maison natale de Pascal
à Clermont (source inconnue) |
Sa localisation, place E.
Lemaigre (à côté de la place de la
Victoire)
Tout proches, quelques repères essentiels de la ville:
cathédrale, office de tourisme, mairie, place de Jaude. |
Cette maison connut un destin invraisemblable: la destruction lors de
la restauration de la cathédrale de Clermont-Ferrand!
Celle-ci
avait été fort malmenée pendant la
Révolution, et un plan de reconsruction avait
été
tracé par Eugène Viollet-Leduc
(1814-1879). Les travaux ne commencèrent qu'en 1866, sous la
direction de son élève Anatole de Baudot.
Mais ils s'étirèrent jusqu'au début
des
années 1900, et c'est alors que la maison fut
rasée.
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Plan de Clermont, fin
XVIIe-début XVIIIe siècle, indiquant la maison familiale des Pascal . À l'époque
-cela apparait sur le plan- Clermont est encore cernée de
remparts.
Source des illustrations: Evolution géographique de
Clermont-Ferrand, Archives du Puy de Dôme. |
Un malheur n'arrive jamais seul!
En 1962, pour le tricentenaire de sa mort, un monument fut
édifié sur cette place. Il y resta au moins 10
ans:
le
Mathouriste
alla le voir en 1971, sur l'injonction
éclairée de
son professeur de Mathématiques Supérieures. Mais
en
1990, un recensement de Pierre-Fançois Aleil,
Statues, Bustes et Monuments
Commémoratifs de la Ville de Clermont (in
Bulletin Historique et
Scientifique de l'Auvergne , tome XCV-1990) nous apprend
son triste sort:
"Ce monument rond
très plat, est coiffé d'une plaque en
bronze portant l'inscription
Ici s'élevait la
maison natale de Blaise Pascal
L'anneau
périphérique
est divisé en cinq segments égaux en pierre de
Volvic
sculptés de bas reliefs: armes parlantes de la famille
Pascal
(l'agneau pascal); façade de la maison détruite;
figures
géométriques et arithmétiques: la
Pascale, le
triangle, la roulette; la machine à calculer; un livre
ouvert,
sur la page de gauche: «Le cœur a ses raisons que
la
...» et en regard «Clermont 728. Puy de
Dôme 640» (expérience sur la pression
atmosphérique).
Sur son étroit terre-plein triangulaire, ce petit monument
dont
la forme n'était pas sans évoquer celle d'une
soucoupe
volante fut pieusement entouré d'un maigre gazon que les
chiens
irrévérencieux transformèrent
bientôt en «caninette»...
Ce que voyant, on remplaça le gazon par des gravillons en
marbre
blanc habituellement utilisés dans les
cimetières.
L'irrévérence de nos amis à quatre
pattes eut
bientôt fait de donner à l'ensemble l'aspect d'une
sculpture polychrome digne des surréalistes... L'ensemble
est
depuis dans l'attente d'une nouvelle décoration"
Plus de vingt ans
après ce
constat, le monument git toujours, démonté et
soigneusement entreposé (félicitons nous au moins
du fait
qu'il ait été conservé!), dans un
dépôt des services techniques de la voirie de la
ville.
C'est là que le
Mathouriste l'a
retrouvé... en pièces
détachées!
Et voici les différents morceaux du puzzle, dans
l'ordre
annoncé par le texte de présentation ci-dessus.
Il
avait été conçu par le sculpteur et
professeur
à l'École des Beaux-Arts de Clermont-Ferrand,
Gustave
Gournier (1903-1986).
Gustave
Gournier (1903-1986). et ses élèves
École des Beaux-Arts de Clermont-Ferrand, entre 1940 et 1950
Quel
était l'ordre d'assemblage? On pouvait penser que le texte
ci-dessus le respectait dans son énumération, mais ce
n'était qu'une conjecture. À défaut d'un
croquis d'étude préalable, réalisé par
l'artiste, seules, des photographies d'époque pouvaient le
révéler... et voici la confirmation! Venue de
Clermont-Ferrand, grâce à de fructueux contacts
noués via ... Internet.
À en juger par les véhicules garés, l'ambiance est délicieusement
Seventies, contemporaine de l'indélébile
souvenir géométrique auquel cette page doit son existence.
Source des images: fonds CRDP, Yvon Forment, Alain Jean-Baptiste / Musée Lecoq / Ville de Clermont-Ferrand
Voici un recoupement intéressant: cet article de journal (sans doute La Montagne,
début 1962? )
montre le sulpteur en plein travail . L'inscriptiion du
médaillon central est bien lisible, mais on peut observer
qu'à ce stade du projet, les panneaux n'ont pas encore leurs
dessins définitifs; seule la machine à calculer
n'évoluera plus.
Le Mathouriste
tient à remercier tous ceux qui l'ont aidé dans
ces
retrouvailles à 40 ans de distance... c'est à
dire:
- son collègue et ami L.-G. Vidiani, dont la
ténacité épistolaire a permis de
retrouver... le
protagoniste suivant et, par lui, la localisation de l'objet;
- son ancien professeur de Sup, Robert Dublanchet, pour
l'avoir
envoyé voir ce monument, puis avoir
enquêté sur
place à la demande de L.-G. Vidiani et retouvé
sa
trace après démontage;
- M. Hautier, responsable du dépôt La Charme des
services techniques de la ville, ainsi que son adjoint, M. Dubourgnoux,
pour leur accueil et leur amabilité devant une demande a
priori
insolite;
- M. G. Belin, élève puis successeur de Gustave
Gournier aux Beaux-Arts de Clermont-Ferrand, qui lui a envoyé la
photo du sculpteur;
- Mme C. Gournier-Dumont et M. C.-A. Dumont, fille et petit-fils
de Gustave Gournier, qui ont retrouvé et lui ont fait
parvenir la coupure de presse;
- M. P.-L. Hennequin, professeur à l'Université
Blaise Pascal à Clermont-Ferrand, qui a acueilli avec beaucoup
de sympathie la requête d'un inconnu et l'a relayée;
- Mme N. Vidal (Musée Lecoq), pour l'intérêt
qu'elle a tout de suite manifesté, et la recherche des
clichés anciens du monument .
Et ce qu'il
aimerait vraiment, c'est remercier
chaleureusement la ville
de Clermont-Ferrand dès qu'elle aurait remonté ce
monument qui
valoriserait son patrimoine touristique et culturel. C'est
hélas
compromis pour 2012, 350 ans après la mort du savant, mais ne
serait-ce
pas une idée intéressante pour fêter
les 400 ans de
sa naissance, en 2023?
Quant au
problème des nuisances canines, il pourrait être
résolu aisément, et
même élégamment du point de vue
géométrique: il suffirait, au lieu de
le monter "à plat", horizontal, d'en disposer le disque de
base sur un
plan incliné. Il lui faudrait alors pour socle une colonne,
non plus
circulaire, mais... à base elliptique, ce qui honorerait
tout à la fois
le traité fondateur d'Apollonius
de Pergé et les idées de Desargues sur
la projection! |
Jamais deux sans trois!
L'année 1962 avait aussi vu, en plus de
l'installation du
monument-souvenir de Gournier, celle d'une statue de Pascal dans la
cour du grand lycée de la ville, qui porte son nom.
Hélas, celle-ci "disparut" en Mai 1968... et ne
réapparut
pas; en 1970, il n'y avait à cet emplacement qu'un socle
vide.
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Deux photographies de
l'inauguration de la statue au lycée Blaise Pascal
(Clermont-Ferrand)
(source: clichés de M. Fischer, relayés par l'Association des Anciens
Élèves, avec les remerciements du Mathouriste ) |
Depuis, un socle bien nu
dans la cour du lycée!
Cliquez sur l'image pour une petite enquête de FR3 - Auvergne
(avec une vidéo)
Cependant,
la statue a fait sa réapparition publique à
Clermont-Ferrand, cinquante ans après sa première
installation!
C'est en effet Mercredi 15 Mai 2013 qu'elle s' est installée,
à titre définitif, dans le nouvel espace permanent
Blaise Pascal, le Penseur du
Musée d'Art Roger Quilliot. Cet espace, créé à l'occasion du 350
ème anniversaire du décès de Pascal (voir cette
vidéo de présentation ), vient essentiellement commémorer, comme son nom l'indique, l'auteur des
Pensées, l'homme de lettres et de religion, alors que l'homme de sciences est célébré au
Musée Lecoq .
Une attente si longue que les bras semblent lui en être tombés! Plus sérieusement,
le
Mathouriste ne
manquera pas de vous informer dès qu'il en apprendra plus sur
les circonstances de son départ du lycée et son long
purgatoire, sans doute dans quelque réserve.
Autres présences Clermontoises
Pascal
séjourna plusieurs fois au château de Bien-Assis,
propriété de son beau-frère Florin
Périer, celui qu'il envoya réaliser
l'expérience au Puy de Dôme. Celui-ci
était alors à la frontière entre ville
et campagne... mais, en 1912, il est racheté par les
nouveaux seigneurs de Clermont,
André
et Édouard Michelin, puis
démoli en 1914, par manque de place, pour que'ils puissent
installer leurs célèbres locaux de la place des
Carmes! Seul subsistera un portail, démonté et
remonté en 1915 au Jardin Lecoq.
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trouvée sur ce site |
de nos jours, au Jardin Lecoq
(source: Wikicommons) |
Un projet muséographique de restituion 3D semble en cours.
Enfin, une statue le
représentant assis a été
réalisée en
1879 par Eugène Guillaume (1822 - 1905). En
attendant sa
visite personnelle,
Le
Mathouriste
emprunte deux images prouvant que l'environnement de ce monument a, lui
aussi, changé: Pascal a perdu de la hauteur de vue...
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(source: ?) |
de nos jours, rue
Saint-Herem |
Rouen
[ chantier en cours!
à suivre...]
Port-Royal
voir, provisoirement,
les liens suivants:
[ chantier en cours!
à suivre...]
LA rencontre au sommet...
qui n'eut jamais lieu!
Tout part d'une
proposition de
Fermat, qui écrit à Pascal pendant un de ses
séjours à Bien-Assis (donc, à
Clermont), en
Juillet 1660.
Et maintenant,
place
à l'imagination (raisonnée).
Quel pourrait être ce point à mi-parcours
où se
rencontrer? Les possibiltés ne sont pas innombrables:
- Rodez, un excellent emplacement pour les rencontres
ratées: c'est le point prévu par Delambre et
Méchain, lors de l'aventure de la mesure du
méridien...
(voir l'excellent livre de Ken Adler, Mesurer le Monde,
Champs histoire)
- Saint-Flour, lieu de rencontre estival des probabilistes...
ce
serait un peu anachronique, la mode n'était pas
lancée.
(mais, soyons honnête: une grosse part de leur correspondance
scientifique a trait aux probabilités! Cela aurait donc pu
constituer un signe avant-coureur.)
- AURILLAC, bien sûr! Rendre hommage à Gerbert,
le Pape Mathématicien, et en route, refaire
l'expérience de la pression atmosphérique au
Plomb du Cantal. Irrésistible.
Hélas, Pascal répond par ses regrets de refuser,
en raison de sa santé.
Il nous reste...
une
idée pour une nouvelle pièce de
théâtre, non? (et comme
lieu, une ville qui l'enfestivale dans ses rues). Un nouveau
défi pour Jean-Claude Brisville:
L’Entretien
de M. Fermat avec M. Pascal le
Jeune, pourquoi pas?
Sur le versant de la réalité historique, on lira
avec
attention l'opinion que professe alors Pascal sur la
Géométrie (comprendre: les
Mathématiques).
Ceux que cet extrait aura alléché trouveront dans
les
Lettres
de Pascal, accompagnées de lettres de ses correspondants
(Gallica BnF) d'autres échanges des deux
mathématiciens. Malgré, de nouveau, une grande
différence de personnalité, l'entente
scientifique
fonctionnait mieux qu'avec Descartes!
Exemple
choisi: Fermat, le 29 Août 1654
"Monsieur,
Nos
coups fourrés continuent toujours, et je suis aussi bien que
vous dans
l'admiration de quoi nos pensées s'ajustent si exactement,
qu'il semble
qu'elles aient pris une même route et fait un même
chemin. Vos derniers
Traités du Triangle arithmétique et de son
application en sont une
preuve authentique; et si mon calcul ne me trompe, votre
onzième
conséquence courait la poste de Paris à Toulouse
, pendant que ma
proposition des nombres figurés, qui est en effet la
même, allait de
Toulouse à Paris. [...]
Au reste, il n'est rien à l'avenir que je ne
vous communique en toute franchise. Songez cependant, si vous le
trouvez
à propos, à cette proposition.
Les puissances carrées de 2, augmentées
de l'unité, sont toujours des nombres premiers.
Le carré de 2, augmenté de l'unité,
fait 5, qui est premier.
Le
carré du carré fait 16, qui augmenté
de l'unité, fait 17, qui est premier.
Le
carré de 16 fait 256, qui augmenté de
l'unité, fait 257, nombre premier.
Le
carré de 256 fait 65536, qui augmenté de
l'unité, fait 65537, qui est premier. Et ainsi à l'infini.
C'est
une propriété de la vérité
de laquelle je vous réponds. La
démonstration en est très malaisée, et
je vous avoue que je n'ai pu
encore la trouver pleinement;je ne vous la proposerais pas pour la
chercher, si j'en étais venu à bout. [...] Nous en parlerons une
autre fois."
On n'a pas résisté à citer
la fin de
l'échange, où Fermat annonce la
primalité de ceux
qu'on nomme aujourd'hui nombres de
Fermat
Fn
= 2kn +1 , kn = 2n
Hélas,
quoiqu'il en réponde... sa conjecture est fausse!
Et Pascal, dans sa
réponse, élude comme vaines les
spéculations sur les nombres. |
Paris, post
mortem
Toute sa vie de
santé fragile,
fréquemment souffrant, Pascal tombe sérieusement
malade
à partir de 1659. Le 17 août 1662, il est victime
de
convulsions et reçoit l’extrême
onction. Il meurt le matin du 19 au n°8 de la rue
Neuve-Saint-Étienne-du-Mont (devenue le n°2 de la
rue
Rollin), à Paris. "Les
amis de M.Pascal ayant fait ouvrir son corps",
on dispose d'un rapport d'autopsie, probablement écrit par
sa
sœur Gilberte sous la dictée d'un
médecin. Il
n'éclaire guère sur les circonstances
médicales de
son décès; l'attention se porte sur la
boîte
cranienne:
|
"... À
l'ouverture de la tête, le crane parut n'avoir aucune suture
si ce n'est peut-être la lambdoïde ou la sagittale,
ce qui apparemment lui avait causé les grands maux de
tête
auxquels il avait été sujet pendant toute sa vie.
Il est
vrai qu'il avait eu autrefois la suture fontale
; mais comme elle était demeurée ouverte fort
longtemps
pendant son enfance, comme il arrive souvent à cet
âge, et
qu'elle n'avait pu se refermer, il s'était formé
un calus
qui l'avait entièrement couverte et qui était si
considérable qu'on le sentait aisément au doigt. Pour la suture coronale,
il n'y avait aucun vestige. Les médecins
observèrent qu'y
ayant une prodigieuse quantité de cervelle dont la substance
était fort solide et fort condensée,
c'était la
raison pour laquelle la suture fontale n'ayant pu se refermer, la
nature y avait pourvu par un calus. ..." |
Masque mortuaire de Pascal
Bibliothèque Sainte-Geneviève (Paris) |
Les restes de Pascal se trouvent à l'église Saint-Etienne du Mont,
à Paris.
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Divers
éléments de mémoire de Blaise Pascal,
église Saint-Etienne du Mont |
Roberto Rossellini a
réalisé pour la télévision
un film sur sa vie, intitulé Blaise Pascal (1971);
Pierre Arditi y joue le rôle titre.
Références
- Blaise PASCAL, Œuvres chronologiques, par L.
Brunschvicg et P. Boutroux (Internet
Archive)
- Blaise PASCAL, Lettres (Gallica
BnF)
- Joseph BERTRAND, Blaise
Pascal (Gallica BnF)
- CONDORCET, Pascal
(Gallica BnF)
- Victor COUSIN, Études
sur Pascal (Gallica
BnF)
- M.P.FAUGERE, Lettres,
Opuscules et Mémoires de Madame Périer et de
Jacqueline,
sœurs de Pascal, et de Marguerite Périer, sa
nièce. (Vaton, 1845) (Gallica BnF)
- A. GAZIER, Les
derniers jours de Blaise Pascal: étude historique et critique
(Internet Archive)
Et pour continuer: